Page:Dick - Les pirates du golfe St-Laurent, 1906.djvu/68

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ton frère et mon cousin ?… Oseront-ils seulement reparaître dans cette baie ?

— Qui sait ?… Gaspard est bien méchant ! Quant à mon frère Thomas, il m’épouvante avec son sourire diabolique et sa manie de se moquer de tout.

— À dire vrai, murmure le capitaine du « Vengeur », comme se parlant à lui-même, ce Thomas est un bien drôle de type. Il ne croit ni à Dieu ni à diable…

— Tu vois bien !… remarque Suzanne.

— … Mais j’ai l’œil sur lui, comme sur l’ « autre », achève Arthur… et je veillerai !

Puis, jetant un regard au firmament, — cette horloge du marin, — il se lève, disant avec une gaieté un peu nerveuse :

— Près d’onze heures !… Oh ! oh ! ma jolie, vous m’avez fait manquer à mes devoirs de capitaine… Il faut que j’aille à bord donner mes derniers ordres… Je veux que le « Vengeur » soit prêt dès huit heures, demain matin, à recevoir la « reine du bord », puisqu’elle veut bien lui confier, pour une croisière d’une quinzaine, sa précieuse petite personne.

— Oui, va, mon ami. Je t’attendrai ici. Surtout, reviens sans tarder.

— Je ne serai pas vingt minutes. Ne va pas prendre froid, au moins.

— Sois tranquille et… prudent.

Une dernière accolade. Deux baisers échangés… et le capitaine Labarou dévale vers la berge, où l’attend un canot léger, genre youyou.

En un clin-d’œil, il est à bord et pagaie vers le « Vengeur », mouillé en pleine eau, à quelques encâblures au large.

D’un bras nerveux, Arthur fait voler la frêle embarcation d’une lame à l’autre, ne perdant pas un coup d’aviron, comme si le salut de sa femme dépendait de sa célérité.