— Tiens ! c’est vrai… j’ai entendu parler de cette cuisine de voyage… Laissons notre petit ami préparer la chose à sa guise, et agissons. Moi, je vais chercher des cailloux. Toi, creuse un trou comme tu pourras.
En un clin d’œil, Arthur eut rempli son chapeau de ces pierres arrondies, à nuances variées, qui abondent dans ces parages.
Il les disposa adroitement entre les tisons du foyer et se chargea d’entretenir le feu.
Gaspard, de son côté, creusait une fosse dans le sable, se servant, en guise de pioche, d’un bout de branche pointue et, à défaut de bêche, de ses mains, pour rejeter la terre au dehors.
Bref, nos trois affamés y mettant chacun du sien, un lit de cailloux brûlants fut étendu au fond de cette fosse, puis recouvert d’une couche d’herbes sur lesquelles le cuissot fut déposé. Par-dessus, on ajouta une nouvelle couche d’herbes ; puis on remplit la fosse de terre autour d’un bâton maintenu verticalement au centre, de façon qu’en le retirant avec précaution, il restât une sorte de cheminée communiquant avec l’extérieur.
Ces deux opérations terminées, les deux cousins crurent, cette fois, qu’il n’y avait plus qu’à laisser faire et prirent une posture aisée pour fumer une bonne « pipe » de tabac — histoire de tromper la faim canine qui les travaillait.
Mais le petit sauvage, lui, songeait bien au repos, vraiment !
Il furetait du regard autour de lui, ayant l’air de chercher quelque chose.
Tout à coup, il partit comme un trait et disparut dans les broussailles.
— Qu’est-ce qui le prend ? se demanda Arthur, qui le suivait des yeux avec étonnement.
Ce petit bonhomme l’intéressait décidément. Il lui trouvait de ces allures, à la fois farouches et gentilles, qu’ont les jeunes chats qui commencent à s’apprivoiser.
Cependant le petit bonhomme revint bientôt, toujours courant. Il tenait à la main une large écorce, qu’il venait de détacher d’un bouleau et qu’il façonnait à l’aide de son poignard, — sans s’arrêter, du reste.
En un tour de main, il eut fabriqué un de ces récipients que nos sucriers canadiens appellent cassots et qu’ils destinent à recueillir la sève de l’érable à sucre.
Un ruisseau coulait non loin de là. Le cassot y fut empli et rapporté à bras tendus.
Tout cela dans le temps de le dire.
C’est alors que les Labarou eurent d’explication de l’utilité du bâtonnet fiché dans la terre recouvrant le jambon.
De temps en temps, en effet, le petit sauvage avait le soin de retirer ce bâtonnet pour vider un peu d’eau dans le trou qu’il laissait.
Et, chaque fois, un jet de vapeur montait à l’orifice :
— Bravo, garçon !… s’écriait Arthur, tout à fait enchanté de son protégé.