Page:Dick - Une horrible aventure, 1875.djvu/104

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— Pitié ! Ah ! si vous disiez que, depuis le jour béni où j’ai entrevu sa divine figure, je suis fou, j’ai la tête en feu et du plomb fondu dans les veines !… si vous disiez que nuit et jour mon esprit est avec elle, épiant dans ses beaux yeux humides chacune de ses pensées de tristesse, suivant sur son pâle visage les progrès de sa douleur !… si vous disiez que le désespoir envahit mon âme, lorsque je vois sa morne silhouette se découper, le soir, sur ses blancs rideaux, à peine éclairés !… si vous disiez enfin que de vertigineuses colères galvanisent mes nerfs chaque fois que je pense à ce Turc maudit dont elle est la prisonnière… vous approcheriez de la vérité…

De la pitié seulement ?… Allons donc ! Ce n’est ni de l’intérêt, ni de la compassion, ni même de l’amour que j’ai pour votre maîtresse : c’est de l’adoration, de l’idolâtrie, du fétichisme !

— Oh ! monsieur, je donnerais bien quelques années de ma vie pour que la princesse pût vous entendre parler ainsi. Il y a si longtemps qu’une voix amie — une voix d’homme — n’a pas résonné à son oreille.

— Elle m’entendra, car je lui dirai tout cela à elle-même.

La soubrette se leva vivement en joignant les mains, pâle d’effroi :

— Y songez-vous, monsieur Georges ?

— Il faut que je la voie ; je veux la voir ; je la verrai.

— Mais mon cher monsieur, vous ne savez donc pas que ja-