Page:Dickens - Barnabé Rudge, tome 2, Hachette, 1911.djvu/163

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dégoût lui en ôtaient la force : seulement, elle lui repoussait le bras avec une telle énergie qu’elle espérait mourir dans ces efforts suprêmes pour se dégager de ses étreintes, et se glissait au fond de la voiture en détournant la tête, et continuant à se débattre avec une vigueur qui l’étonnait elle-même autant que son persécuteur. La voiture s’arrêta de nouveau.

« Emportez celle-là, dit Hugh à l’homme qui vint ouvrir la portière, en prenant la main de miss Haredale et la sentant retomber inanimée ; elle est pâmée.

— Tant mieux, grogna Dennis, car c’était cet aimable gentleman : elle en sera plus tranquille. J’aime ça, quand elles se pâment, à moins qu’elles ne soient calmes et douces comme des colombes.

— Pouvez-vous la prendre à vous tout seul ? demanda Hugh.

— Je ne peux pas le savoir avant d’essayer. Mais je dois pouvoir en venir à bout. J’en ai déjà enlevé bien d’autres dans ma vie, dit le bourreau. Allons ! hop. Elle n’est pas légère, camarade. Ces jolies filles sont toutes comme ça. Allons ! encore un petit coup de main ! là ! je la tiens. »

Pendant ce temps-là il avait pris à bras la jeune demoiselle, et s’en allait chancelant sous son fardeau.

« À votre tour, ma jolie poulette, dit Hugh, attirant à lui Dolly. Vous vous rappelez ce que je vous ai dit : « Chaque cri, chaque baiser. » À présent, criez bien fort, si vous m’aimez, ma mignonne. Un petit cri, seulement, mademoiselle. Ma belle demoiselle, un petit cri seulement pour l’amour de moi. »

Repoussant sa face de toutes ses forces, et se renversant la tête en arrière, Dolly se laissa transporter hors de la chaise, à la suite de miss Haredale, dans une méchante cabane, où son ravisseur, qui la serrait contre sa poitrine, la déposa doucement par terre.

Pauvre Dolly ! elle avait beau faire, elle n’en était que plus jolie et plus attrayante. Quand ses yeux pétillaient de colère et qu’elle entr’ouvrait ses lèvres de pourpre pour laisser passer le souffle rapide de sa fureur, comment vouliez-vous qu’on résistât à cela ? Quand elle pleurait, et sanglotait à se fendre le cœur, et qu’elle se lamentait de ses peines de