Page:Dickens - Barnabé Rudge, tome 2, Hachette, 1911.djvu/178

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mer la porte sur le nez. Avec l’impatience et l’excitation naturelles à son caractère et à sa position, M. Haredale s’avança de son côté pour prendre la parole, quand le gros monsieur lui dit :

« Mon bon monsieur, laissez-moi, je vous prie, obtenir d’abord une réponse. Voici la sixième fois que je viens ici. Hier seulement, je suis venu cinq fois. On menace de détruire ma maison. Ils doivent venir la brûler ce soir. C’était déjà leur projet hier ; mais ils ont eu de l’occupation ailleurs. Laissez-moi, je vous prie, obtenir une réponse.

— Mon bon monsieur, répondit M. Haredale en secouant la tête, ma maison a été brûlée de fond en comble. Mais, à Dieu ne plaise que la vôtre soit incendiée de même ! Obtenez votre réponse ; seulement, de grâce, tâchez que ce ne soit pas long.

— Eh bien ! milord, vous entendez ? dit le vieux gentleman à quelqu’un qui se trouvait en haut de l’escalier, où l’on voyait voltiger sur le palier le pan d’une robe de magistrat. Voici un gentleman dont la maison a été effectivement réduite en cendres cette nuit.

— Mon Dieu ! mon Dieu ! répliqua une voix bourrue. J’en suis bien fâché, mais qu’est-ce que vous voulez que j’y fasse ? Je ne peux pas la rebâtir, si elle est démolie. Le chef de la justice de la Cité ne peut pas être occupé à rebâtir les maisons qu’on démolit, mon bon monsieur ; vous sentez que c’est ridicule.

— Mais il me semble que le chef de la magistrature de la Cité pourrait empêcher les gens d’avoir besoin qu’on rebâtisse leurs maisons, si le chef de la magistrature est un homme et non pas une momie…. qu’en dites-vous, milord ? cria le vieux gentleman en colère.

— Vous devriez être plus respectable, monsieur, dit le lord-maire, du moins plus respectueux, voulais-je dire.

— Plus respectueux, milord ! répondit le vieux gentleman. J’ai été cinq fois assez respectueux comme cela hier. Le respect est une bonne chose, mais il ne faut pas en abuser. On ne peut pas toujours être à faire du respect, quand on sait qu’on va avoir sa maison brûlée sur sa tête, avec tout ce qu’il y a dedans. Dites-moi ce qu’il faut que je fasse, milord. Voulez-vous, oui ou non, me donner protection ?

— Je vous ai déjà dit hier, monsieur, dit le lord-maire,