Page:Dickens - Barnabé Rudge, tome 2, Hachette, 1911.djvu/64

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Si elle n’est pas ici pour vous admirer, c’est que j’ai eu soin d’elle : je lui ai envoyé une demi-douzaine de gentlemen, chacun avec un beau drapeau bleu, quoique pas si beau de moitié que le vôtre, pour la mener, en grande cérémonie, à une maison magnifique, tout ornée de banderoles d’or et d’argent, et de mille autres choses plaisantes à voir, où elle va attendre que vous soyez revenu, et où je vous réponds qu’elle ne manque de rien.

— Ah ! vraiment ? dit Barnabé, la figure rayonnante de plaisir. Voilà qui me réjouit ! À la bonne heure, mon bon Hugh !

— Bah ! ce n’est rien en comparaison de ce que nous allons voir, reprit Hugh en clignant de l’œil à Dennis, qui regardait avec un grand étonnement son nouveau compagnon d’armes.

— Comment ! est-ce vrai ?

— Oh mais, rien du tout. De l’argent, des chapeaux à cornes avec des plumets, des habits rouges brodés d’or, tout ce qu’il y a de plus beau au monde, maintenant et jamais, tout cela est à nous, si nous promettons à ce noble gentleman, le meilleur gentleman de la terre, de porter nos drapeaux pendant quelques jours sans les perdre : nous n’avons pas plus que ça à faire.

— Quoi ! pas plus que ça ? cria Barnabé avec des yeux animés, en serrant de toutes ses forces la hampe de son étendard. Je vous réponds, alors, que ce n’est pas moi qui perdrai le mien. Laissez faire, il est en bonnes mains. Vous me connaissez, Hugh : n’ayez pas peur que personne me le prenne.

— Voilà qui est bien parlé, cria Hugh ; ha ! ha ! noblement parlé. Je reconnais là mon intrépide Barnabé, avec qui j’ai tant de fois sauté et fait des tours. Je savais bien que je ne me trompais pas sur son compte…. Est-ce que vous ne voyez pas, ajouta-t-il à l’oreille de Dennis, vers lequel il s’était rapproché, que ce garçon-là est imbécile, et qu’on peut lui faire faire tout ce qu’on voudra si on sait le prendre ? Sans bêtise, savez-vous qu’il vaut douze hommes à lui tout seul ? vous n’avez qu’à essayer. Laissez-moi faire, vous verrez bientôt s’il peut nous être utile ou non. »

M. Dennis reçut ces explications avec des signes de tête et des clignements d’yeux qui annonçaient sa complète édi-