Page:Dickens - Bleak-House, tome 2.djvu/18

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«  À présent, dit-elle avec calme, si vous voulez me dire tout ce que j’aurai à faire, je vous écoute, chère miss.

— Pour l’instant, c’est peu de chose, mon enfant ; quand le docteur va venir, je lui dirai que je me sens un peu malade et que c’est toi que je prends pour me soigner. »

La chère petite me remercia de tout son cœur.

«  Et, poursuivis-je, quand tu entendras miss Éva dans le jardin, si je ne peux pas me lever pour aller à la fenêtre, tu lui diras que je repose, que j’étais lasse et que je me suis endormie ; reste auprès de moi tout le temps ; et surtout, Charley, que personne ne mette le pied dans ma chambre. »

Elle me promit tout cela, et je me couchai, car j’étais accablée ; je demandai au docteur de ne pas annoncer dans la maison que j’étais malade ; il se rendit à ma prière ; la nuit vint et fut mauvaise ; mais au matin je pus encore aller à la fenêtre pour parler à Éva. Le lendemain, elle m’appela comme toujours… Oh ! que sa voix me parut douce ! je priai Charley de lui dire que j’étais endormie (la parole me devenait très-pénible) ; j’entendis Éva lui répondre :

«  Ne l’éveille pas, Charley, prends bien garde.

— Quel air avait-elle ? demandai-je.

— Un peu contrarié, répliqua Charley en jetant un coup d’œil à travers les rideaux.

— Mais je suis sûre qu’elle est toujours bien belle, n’est-ce pas.

— Oh ! je crois bien, miss ;… elle est toujours là à regarder votre fenêtre.

«  Charley, quand elle saura que je suis malade, elle voudra venir auprès de moi ; empêche-la d’entrer, si tu m’aimes, car je mourrai si elle me regarde un seul instant.

— Elle n’entrera pas, soyez tranquille ; non, non, je vous le promets !

— Bien, Charley, je me fie à toi ; et maintenant viens t’asseoir près de mon lit ; donne-moi ta main, que je la sente ; je ne te vois plus, enfant ; je suis aveugle, Charley. »