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dans les intérêts importants qui ont rapport à ces cordes de l’esprit humain,… cordes… auxquelles il est inutile d’imprimer à cette heure une vibration douloureuse… Croyez-le, votre ami n’est pas un imbécile… Qu’est-ce que c’est que cette heure-là, Tony ?

— Onze heures qui sonnent à l’horloge de Saint-Paul ; toutes celles de la Cité vont lui répondre. »

Ils se taisent pour écouter la voix métallique des vieilles tours échelonnées à distance. Le dernier coup vient de mourir, et le calme profond de la nuit semble plus mystérieux encore. L’un des résultats désagréables d’un entretien nocturne à voix basse est d’évoquer une atmosphère de silence où glissent des ombres de son qui vous font tressaillir : craquements étranges, murmures insaisissables, frôlements d’habits invisibles, bruit de pas effrayants qui ne laissent point de traces sur la grève ou sur la neige. Les deux amis frissonnent ; pour eux, l’air est plein de ces fantômes, et, d’un commun accord, ils se retournent pour voir si la porte est fermée.

«  Et la troisième chose ? alliez-vous dire, reprend M. Guppy en se rapprochant du feu et en continuant de ronger son ongle.

— Tertio, répond Tony, c’est qu’il est peu agréable de comploter contre un mort, dans la chambre même où il mourut, surtout quand c’est vous qui habitez cette chambre.

— Mais ce n’est point un complot ; encore moins contre lui.

— C’est possible ; mais tout ça ne me va pas. Demeurez ici quelque temps, et vous verrez ensuite.

— Quant à des morts, réplique M. Guppy en tournant la question, il n’y a guère de chambre où il n’y en ait pas eu.

— Je ne dis pas non ; mais dans ces chambres-là on ne s’occupe pas des morts, et alors ils vous laissent tranquilles. »

Les deux amis se regardent ; M. Guppy s’empresse de dire que c’est peut-être un service qu’ils rendent au défunt, et qu’il en a presque la certitude. Un silence pénible succède à ces paroles, jusqu’au moment où M. Weevle, en tisonnant tout à coup, fait tressaillir M. Guppy, comme si c’eût été son cœur que M. Weevle eût fouillé.

«  Quelle horreur, dit-il, que cette abominable suie ! Ouvrons la fenêtre pour avoir un peu d’air ; on étouffe dans cette chambre. »

Ils lèvent le châssis, et, s’appuyant sur l’allége, ils regardent dehors. La rue est trop étroite pour leur permettre d’apercevoir le ciel ; mais la lumière qui brille çà et là aux vitres grais-