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Page:Dickens - Contes de Noël, traduction Lorain, 1857.djvu/125

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ne manque jamais d’arriver, je demeure encore leur père et leur ami. C’est écrit là-haut ; c’est dans la nature des choses. »

Après cette grande et belle profession de foi, il ouvrit la lettre de l’alderman et la lut.

« Très-poli, très-aimable assurément ! s’écria sir Joseph. Milady, l’alderman a l’obligeance de me rappeler que : « il a eu l’honneur insigne (il est trop bon, en vérité) de me rencontrer chez notre ami commun, le banquier Deedles, et il me fait la faveur de me demander s’il me serait agréable qu’il supprimât Will Fern. »

Extrémement agréable ! répliqua milady Bowley. C’est le pire de tous ces gens-là ! Il aura commis quelque vol, j’espère ?

— Non, dit sir Joseph consultant la lettre, pas tout à fait. Quelque chose d’approchant ; pas tout à fait néanmoins. Il paraîtrait qu’il est venu à Londres chercher de l’ouvrage (toujours pour améliorer sa position ; vous savez, c’est son excuse éternelle) ; trouvé la nuit endormi sous un hangar, il a été arrêté et conduit le lendemain devant l’alderman. Celui-ci remarque, et il a raison, selon moi, qu’il est déterminé à supprimer ce genre d’abus, et que s’il m’est agréable que Will Fern soit supprimé, il commencera par lui avec plaisir.

— Qu’on en fasse un exemple, n’importe comment, repartit la dame. L’hiver dernier, lorsque j’ai voulu introduire parmi les hommes et les garçons du village, comme un moyen d’employer agréablement les veillées, l’habitude de découper du feston et de faire des œillets, en chantant pendant ce travail les vers suivants, mis en musique d’après le nouveau système :

Aimons notre profession,
Donnons la bénédiction
Au squire ainsi qu’à sa maison.
Que toujours notre ration
Suffise à notre ambition,
N’ayons pas la prétention
De changer de position.


Ce même Fern, je le vois encore, porta la main à son chapeau et osa me dire : Je demande humblement pardon à milady, mais est-ce qu’on me prend pour une grande petite fille ? Je m’y attendais, après tout ; peut-on espérer autre chose que de l’ingratitude et de l’insolence des gens de cette classe ? mais ne parlons pas de cela. Sir Joseph, faites un exemple de ce Will Fern !

— Hem ! dit sir Joseph. monsieur Fish, si vous vouliez bien avoir la bonté de voir… »