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LE CRICRI DU FOYER.

physionomie est bienveillante, bonne et tendre… franche et honnête aussi, j’en suis certaine. Ce cœur généreux, qui cherche à dissimuler tous ses bienfaits sous une apparence de rudesse et de brusquerie, se trahit dans tous ses regards, n’est-ce pas ?

— Et lui donne l’air noble, » ajouta Caleb dans son calme désespoir.

— Et lui donne l’air noble ! s’écria la jeune aveugle. Il est plus âgé que May, mon père ?

— Oui, répondit Caleb, comme malgré lui ; il est un peu plus âgé que May… Qu’est-ce que cela fait ?

— Ô mon père ! oui ! Être sa compagne patiente pendant les infirmités de la vieillesse, être sa garde assidue dans la maladie et son amie constante dans ses heures de souffrance et de chagrin ; ne jamais se sentir fatiguée de travailler pour lui ; veiller sur sa santé, lui prodiguer mille soins, s’asseoir près de son lit, lui parler dans la veille, prier pour lui dans son sommeil ; quels privilèges ! quelles occasions de lui prouver sa fidélité et son dévoûment !… Ferait-elle tout cela, cher père ?

— Sans aucun doute, dit Caleb.

— J’aime May, mon père ; je puis l’aimer du fond de mon âme ! » s’écria la jeune aveugle. Et en parlant ainsi elle appuya son pauvre front sur l’épaule de Caleb, en pleurant, en pleurant si abondamment, que Caleb se reprocha presque de lui avoir causé ce bonheur si plein de larmes.