Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 1.djvu/150

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Pourtant la permission était accordée et ne fut pas retirée, et à la fin du mois accordé à Peggotty, nous étions tous deux prêts à partir.

M. Barkis entra dans la maison pour chercher les malles de Peggotty. Je ne lui avais jamais vu auparavant franchir la grille du jardin, mais cette fois il entra dans la maison ; et en chargeant sur son épaule la plus grande caisse pour l’emporter, il me jeta un regard qui voulait dire quelque chose, si tant est que le visage de M. Barkis voulût jamais rien dire.

Naturellement Peggotty était un peu triste de quitter une maison qu’elle habitait depuis tant d’années et où elle s’était attachée aux doux êtres qu’elle aimait le plus au monde, ma mère et moi. De grand matin elle était allée faire un tour au cimetière, et elle monta dans la carriole en tenant son mouchoir sur ses yeux.

Tant qu’elle conserva cette position, M. Barkis ne donna pas le plus léger signe de vie. Il restait à sa place ordinaire, dans son attitude accoutumée, comme un grand mannequin. Mais lorsqu’elle commença à regarder autour d’elle et à me parler, il hocha la tête et se mit à rire plusieurs fois de suite, je ne sais ni de quoi ni pourquoi.

« Belle journée, monsieur Barkis ! dis-je alors par politesse.

— Pas trop mauvais temps, dit M. Barkis, qui était généralement très-réservé dans ses expressions et qui n’aimait pas à se compromettre.

— Peggotty est tout à fait remise maintenant, monsieur Barkis remarquai-je pour lui faire plaisir.

— Vraiment ? » dit M. Barkis.

Après avoir réfléchi, il lui jeta un regard astucieux et lui dit :

« Êtes-vous tout à fait bien ? »

Peggotty se mit à rire et répondit affirmativement.

« Mais tout à fait bien, vous êtes sûre ? grommela M. Barkis en s’approchant d’elle peu à peu et en lui donnant un léger coup de coude. Vous êtes sûre ? vraiment tout à fait bien ? Vous en êtes bien sûre ? » Et à chacune de ces questions que M. Barkis accompagnait d’un nouveau coup de coude, il se rapprochait d’elle, si bien qu’à la fin nous étions tous entassés dans le coin gauche de la carriole et que Je fus bientôt serré à ne pouvoir presque plus respirer.

Peggotty appela l’attention de M. Barkis sur mes souffrances,