Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 1.djvu/153

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comme je suis content. Et en effet, je désirais de tout mon cœur le mariage de Peggotty.

« Eh bien ! mon chéri, dit Peggotty en me serrant un peu dans ses bras, j’y ai pensé nuit et jour de toutes les manières, et j’espère ne pas m’en repentir. Mais j’y réfléchirai encore ; je veux en parler à mon frère, et en attendant nous le garderons pour nous, David. Barkis est un brave homme, tout rond, dit Peggotty, et si j’essaye de remplir mes devoirs envers lui, je crois que ce sera ma faute si je ne suis pas… si je ne suis pas tout à fait bien, » dit Peggotty en riant de tout son cœur.

Cette citation empruntée à la question même de M. Barkis, était si bien placée et nous amusa tant que nos éclats de rire durèrent jusqu’au moment où nous nous trouvâmes en vue de la maison de M. Peggotty.

Elle n’avait pc changé, sauf que je la trouvai peut-être un peu plus petite et mistress Gummidge était debout à la porte, comme si elle n’avait pas bougé de là depuis ma dernière visite. L’intérieur n’avait pas subi plus de changements que l’extérieur. Le petit vase bleu de ma chambre était toujours rempli de plantes marines. Je fis un tour sous le hangar, et j’y retrouvai dans leur coin accoutumé les homards, les crabes, les langoustes, formant, comme par le passé, une masse compacte, et toujours possédés du même désir de pincer les doigts à tout l’univers. Mais je n’apercevais pas Émilie, je demandai à M. Peggotty où je pourrais la trouver.

« Elle est à l’école, monsieur, dit M. Peggotty en s’essuyant le front, après avoir déposé la malle de sa sœur ; elle va revenir, ajouta-t-il en regardant la vieille horloge, d’ici à vingt minutes, une demi-heure au plus ; nous nous apercevons tous de son absence, je vous en réponds. »

Mistress Gummidge soupira.

« Allons, allons, mère Gummidge ! cria M. Peggotty.

–Je le sens plus que tout autre, dit mistress Gummidge ; je suis une pauvre femme perdue, sans ressource, et c’était la seule personne avec laquelle je n’eusse pas de contrariété. »

Mistress Gummidge, toujours gémissant et secouant la tête, se mit à souffler le feu. M. Peggotty se tourna de notre côté, pendant qu’elle était ainsi occupée, et me dit à voix basse en mettant sa main devant sa bouche : « C’est le vieux ! » Ce qui me fit supposer avec raison que l’humeur de mistress Gummidge n’avait fait aucun progrès depuis ma dernière visite.