Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 1.djvu/273

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— Cependant, vous n’avez pas hésité à me croire coupable de ce péché-là, ce matin ? répondis-je.

— Oh ! non, monsieur Copperfield, repartit Uriah, oh ! non, soyez-en sûr ! une telle pensée n’est jamais entrée dans ma tête. Je ne vous aurais pas accusé de fierté pour avoir pensé que nous étions dans une situation trop humble pour vous, parce que nous sommes placés si bas !

— Avez-vous beaucoup étudié le droit depuis quelque temps ? demandai-je pour changer de sujet.

— Oh ! monsieur Copperfield, dit-il d’un air de modestie, mes lectures peuvent à peine s’appeler des études. Je passe quelquefois une heure ou deux dans la soirée avec M. Tidd.

— C’est un peu rude, je suppose, lui dis-je.

— Un peu rude pour moi quelquefois, répondit Uriah. Mais je ne sais pas s’il en serait de même pour une personne mieux partagée du côté des moyens. »

Après avoir exécuté de sa main droite un petit air sur son menton avec ses deux doigts de squelette, il ajouta :

« Il y a des expressions, voyez-vous, monsieur Copperfield, des mots et des termes latins qui se rencontrent dans M. Tidd, et qui sont fort embarrassants pour un lecteur d’une instruction aussi modeste que la mienne.

— Est-ce que vous seriez bien aise d’apprendre le latin ? lui dis-je vivement : je pourrais vous donner des leçons à mesure que je l’étudie moi-même.

— Oh ! merci, monsieur Copperfield, répondit-il en secouant la tête, vous êtes vraiment bien bon de me l’offrir, mais je suis beaucoup trop humble pour l’accepter.

— Quelle folie, Uriah !

— Oh ! pardonnez-moi, monsieur Copperfield. Je vous remercie infiniment, et ce serait un grand plaisir pour moi, je vous assure, mais je suis trop humble pour cela. Il y a déjà assez de gens disposés à m’accabler par le reproche de ma situation inférieure, sans que j’aille encore blesser leurs idées en devenant savant. L’instruction n’est pas faite pour moi. Dans ma position, il vaut mieux ne pas aspirer trop haut. Pour avancer dans la vie, il faut que j’avance humblement, monsieur Copperfield. »

Je n’avais jamais vu sa bouche si ouverte, ni les rides de ses joues si profondes qu’au moment où il m’énonçait ce principe, en secouant la tête et en se tortillant modestement.

« Je crois que vous avez tort, Uriah. Je suis sûr qu’il y a