Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 2.djvu/204

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d’ignorer encore toutes choses, vous sourit, et moi, mon cher M. Copperfield, je suis

« Votre amie blien affligée,
Emma Micawber. »


Je ne me sentais pas le droit de donner a une femme aussi pleine d’expérience que mistress Micawber d’autre conseil que celui de chercher à regagner la confiance de M. Micawber à force de patience et de bonté (et j’étais bien sûr qu’elle n’y manquerait pas), mais cette lettre ne m’en donnait pas moins à penser.


Permettez-moi, encore une fois, de m’arrêter sur un moment si mémorable de ma vie. Laissez-moi me ranger pour voir défiler devant moi dans une procession fantastique l’ombre de ce que je fus, escorté par les fantômes des jours qui ne sont plus.

Les semaines, les mois, les saisons s’écoulent. Elles ne m’apparaissent guère que comme un jour d’été et une soirée d’hiver. Tantôt la prairie que je foule aux pieds avec Dora est tout en fleurs, c’est un tapis parsemé d’or ; et tantôt nous sommes sur une bruyère aride ensevelie sous des monticules de neige. Tantôt la rivière qui coule le long de notre promenade du dimanche étincelle aux rayons du soleil d’été, tantôt elle s’agite sous le souffle du vent d’hiver et s’épaissit au contact des blocs de glace qui viennent envahir son cours. Elle bondit, elle se précipite, elle s’élance vers la mer plus vite que ne saurait le faire aucune autre rivière au monde.

Il n’y a rien de changé dans la maison des deux vieilles petites dames. La pendule fait tic tac sur la cheminée, le baromètre est suspendu dans le vestibule. La pendule ni le baromètre ne vont jamais bien, mais la foi nous sauve.

J’ai atteint ma majorité ! J’ai vingt et un ans. Mais c’est là une sorte de dignité qui peut être le partage de tout le monde ; voyons plutôt ce que j’ai fait par moi-même.

J’ai apprivoisé cet art sauvage qu’on appelle la sténographie :