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Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 2.djvu/371

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mettre à la voile : ma chère vieille bonne vint à Londres ; son cœur se brisa de douleur à notre première entrevue. J’étais constamment avec elle, son frère et les Micawber, qui ne les quittaient guère ; mais je ne revis plus Émilie.

Un soir, j’étais seul avec Peggotty et son frère. Nous en vînmes à parler de Ham. Elle nous raconta avec quelle tendresse il l’avait quittée, toujours calme et courageux. Il ne l’était jamais plus, disait-elle, que quand elle le croyait le plus abattu par le chagrin. L’excellente femme ne se lassait jamais de parler de lui, et nous mettions à entendre ses récits le même intérêt qu’elle mettait à nous les faire.

Nous avions renoncé, ma tante et moi, à nos deux petites maisons de Highgate : moi, pour voyager, et elle pour retourner habiter sa maison de Douvres. Nous avions pris, en attendant, un appartement dans Covent-Garden. Je rentrais chez moi ce soir-là, réfléchissant à ce qui s’était passé entre Ham et moi, lors de ma dernière visite à Yarmouth et je me demandais si je ne ferais pas mieux d’écrire tout de suite à Émilie, au lieu de remettre une lettre pour elle à son oncle, au moment où je dirais adieu à ce pauvre homme sur le tillac, comme j’en avais d’abord formé le projet. Peut-être voudrait-elle, après avoir lu ma lettre, envoyer par moi quelque message d’adieu à celui qui l’aimait tant. Mieux valait lui en faciliter l’occasion.

Avant de me coucher, je lui écrivis. Je lui dis que j’avais vu Ham, et qu’il m’avait prié de lui dire ce que j’ai déjà raconté plus haut. Je le répétai fidèlement, sans rien ajouter. Lors même que j’en aurais eu le droit, je n’avais nul besoin de rien dire de plus. Ni moi, ni personne, nous n’aurions pu rendre plus touchantes ses paroles simples et vraies. Je donnai l’ordre de porter cette lettre le lendemain matin, en y ajoutant seulement pour M. Peggotty la prière de la remettre à Émilie. Je ne me couchai qu’à la pointe du jour.

J’étais alors plus épuisé que je ne le croyais ; je ne m’endormis que lorsque le soleil paraissait déjà à l’horizon, et la fatigue me tint au lit assez tard le lendemain. Je fus réveillé par la présence de ma tante à mon chevet, quoiqu’elle eût gardé le silence. Je sentis dans mon sommeil qu’elle était là, comme cela nous arrive quelquefois.

« Trot, mon ami, dit-elle en me voyant ouvrir les yeux, je ne pouvais pas me décider à vous réveiller. M. Peggotty est ici ; faut-il le faire monter ? »