Page:Dickens - David Copperfield, Hachette, 1894, tome 2.djvu/372

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Je répondis que oui ; il parut bientôt.

« Maître Davy, dit-il quand il m’eut donné une poignée de main, j’ai remis à Émilie votre lettre, et voici le billet qu’elle a écrit après l’avoir lu. Elle vous prie d’en prendre connaissance et, si vous n’y voyez pas d’inconvénient, d’être assez bon pour vous en charger.

— L’avez-vous lu ? » lui dis-je.

Il hocha tristement la tête ; je l’ouvris et je lus ce qui suit :


«  J’ai reçu votre message. Oh ! que pourrais-je vous dire pour vous remercier de tant de bonté et d’intérêt ?

« J’ai serré votre lettre contre mon cœur. Elle y restera jusqu’au jour de ma mort. Ce sont des épines bien aiguës, mais elles me font du bien. J’ai prié par là-dessus. Oh ! oui, j’ai bien prié. Quand je songe à ce que vous êtes, et à ce qu’est mon oncle, je comprends ce que Dieu doit être, et je me sens le courage de crier vers lui.

« Adieu pour toujours, mon ami ; adieu pour toujours dans ce monde. Dans un autre monde, si j’obtiens mon pardon, peut-être me réveillerai-je enfant et pourrai-je venir alors vous retrouver ? Merci, et que Dieu vous bénisse ! Adieu, adieu pour toujours ! »


Voilà tout ce qu’il y avait dans sa lettre, avec la trace de ses larmes.

« Puis-je lui dire que vous n’y voyez pas d’inconvénient, maître Davy, et que vous serez assez bon pour vous en charger ? me demanda M. Peggotty quand j’eus fini ma lecture.

— Certainement, lui dis-je, mais je réfléchissais.

— Oui, maître Davy ?

— J’ai envie de me rendre à Yarmouth. J’ai plus de temps qu’il ne m’en faut pour aller et venir avant le départ du bâtiment. Il ne me sort pas de l’esprit, lui et sa solitude ; si je puis lui remettre la lettre d’Émlie et vous charger de dire à votre nièce, à l’heure du départ, qu’il l’a reçue, cela leur fera du bien à tous deux. J’ai accepté solennellement la commission dont il me chargeait, l’excellent homme, je ne saurais m’en acquitter trop complètement. Le voyage n’est rien pour moi. J’ai besoin de mouvement, cela me calmera. Je partirai ce soir. »

Il essaya de me dissuader, mais je vis qu’il était au fond de mon avis, et cela m’aurait confirmé dans mon intention si j’en avais eu besoin. Il alla au bureau de la diligence, sur ma demande, et prit pour moi une place d’impériale. Je partis le soir par cette même route que j’avais traversée jadis, au milieu de tant de vicissitudes diverses