Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 2.djvu/242

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Lui, mon mauvais ange, ou le mauvais ange de n’importe qui ? Steerforth, mon ami, mon défenseur, mon guide ? Ma chère Agnès, n’êtes-vous pas injuste, est-ce digne de vous de le juger d’après l’état où j’étais l’autre soir ?

» — Je ne le juge pas d’après ce que je vis ce soir-là, » dit-elle avec calme.

» — Et sur quoi le jugez-vous donc ?

» — Sur plusieurs choses, très légères en elles-mêmes, mais qui ne me paraissent pas telles quand je les rapproche. Je le juge, Trotwood, en partie d’après ce que vous m’en avez raconté vous-même, et en partie d’après votre caractère et l’influence qu’il exerce sur vous. »

Il y eut toujours, dans l’accent modeste de sa voix, quelque chose qui semblait faire vibrer en moi une fibre particulière… une fibre qui ne répondait qu’à ce son. Cet accent était toujours grave ; mais, toutes les fois qu’il était très grave, comme en ce moment, il avait une puissance qui me subjuguait complètement. J’étais assis auprès d’elle, la contemplant, les yeux baissés sur son ouvrage, l’écoutant, et Steerforth, en dépit de toute mon affection pour lui, m’apparaissait sous un jour plus sombre.

« — C’est bien hardi à moi, » dit Agnès re-