Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 2.djvu/37

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au Dr Strong au moins mille six cent quarante-neuf ans pour compléter son encyclopédique travail, et le Docteur avait déjà célébré le soixante-deuxième anniversaire de sa naissance !

Mais cela n’empêchait pas le Dr Strong d’être personnellement l’idole de tous ses élèves, et, en vérité, ils auraient été de très mauvais garnements s’il en eût été autrement ; car c’était bien le meilleur des hommes, doué d’une simplicité si naïve qu’il aurait touché un cœur de pierre. Quand il se promenait pensif, dans la cour solitaire, les corneilles elles-mêmes semblaient le regarder d’un air narquois, persuadées qu’elles connaissaient mieux que lui les ruses de ce monde. Gare à lui s’il s’égarait seul près de la grille où le guettait aussi quelque maraudeur déguenillé de la ville qui, par le ton piteux de sa supplique, ne tardait pas à captiver toute son attention en faveur de sa pauvre femme malade ou de ses enfants mourant de faim. Le vagabond s’en allait pourvu pour deux jours au moins. La chose était si notoire, que les sous-maîtres et les grands de la première classe faisaient tous leurs efforts pour éloigner ces mendiants avant qu’ils eussent pu arracher le Docteur à ses profondes méditations sur les racines grec-