Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 2.djvu/95

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

et je vous préviens que l’heureux mortel me trouvera très exigeant. »

Nous causions ainsi sur ce ton moitié badin et moitié sérieux, qui s’explique par les rapports familiers de notre enfance, lorsque tout-à-coup Agnès, changeant de manière et d’accent, me dit :

« — Trotwood, il est une question que je veux vous adresser, et pour laquelle je dois profiter d’une occasion qui ne s’offrira peut-être plus à moi de long-temps : c’est une question que je ne voudrais adresser qu’à vous seul… Avez-vous remarqué le changement qui se fait dans mon père depuis plusieurs mois ? »

Je l’avais remarqué… Mon hésitation à répondre fut comprise par Agnès qui baissa la tête et versa des larmes :

« — Dites-moi ce que ce peut être, » dit-elle à demi-voix.

« — Je crains… m’est-il permis de parler en toute sincérité, Agnès, aimant votre père comme je l’aime !

» — Oui, parlez.

» — Je crains qu’il ne nuise à sa santé par une habitude qui n’a fait qu’augmenter depuis le premier jour où je vins ici. Il a souvent une agitation nerveuse… ou ce qui me paraît tel.