Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 3.djvu/145

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Elle ne tarda pas à deviner mes intentions et à me voir venir de loin : il était clair qu’elle n’avait guère de sympathies pour Shakspeare, et cette éducation alla bien lentement.

Sans qu’il s’en doutât, je fis servir Traddles à mes plans, et, chaque fois qu’il venait nous voir, c’était à lui que j’adressais mes petites leçons pour édifier Dora indirectement. La dose de sagesse que j’administrai ainsi à Traddles fut énorme et de la meilleure qualité ; mais elle n’eut, sur Dora, d’autre effet que d’étouffer sa gaîté, en entretenant en elle la peur que l’écolier a du maître ou la mouche de l’araignée.

Après des mois de persévérance, reconnaissant que je n’avais rien produit avec toutes mes leçons directes et indirectes, je m’avisai de penser que, peut-être, l’esprit de Dora était déjà formé ; laissant toute ma doctrine, je résolus d’être, à l’avenir, content de ma femme-enfant telle qu’elle était, et de ne plus chercher à la changer par aucune éducation systématique. Fatigué de ma sagesse stérile et de la contrainte que j’avais imposée à ma chère Dora, j’achetai une jolie paire de pendants d’oreilles pour elle, avec un collier neuf