Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 3.djvu/209

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toute sa vie et toute sa force… Impossible de désespérer complètement.

« — Davy, écoutez-moi bien… Je vais vous dire quelque chose que j’ai déjà souvent voulu vous dire depuis quelque temps. Peut-être l’avez-vous souvent pensé aussi ? Davy, mon chéri, j’étais, trop jeune, j’en ai peur… »

Je penche ma tête sur l’oreiller, à côté d’elle : elle me regarde et parle bien doucement… Peu à peu je reconnais, avec un serrement de cœur, qu’elle parle d’elle comme si elle était morte.

« — … J’étais trop jeune, j’en ai peur ; je ne veux pas seulement dire jeune d’années, mais encore d’expérience, d’idées, de tout. J’étais une si sotte petite créature. Hélas ! n’eût-il pas mieux valu nous contenter de nous aimer comme deux enfants s’aiment, pour nous oublier ensuite, et rien de plus. Je commence à penser que je n’étais pas propre à être une femme. »

Je m’efforce de retenir mes larmes et de répondre : — « Dora, chère amie, aussi propre, vous, à être une femme, que moi à être un mari ! 

» — Je ne sais pas trop… peut-être, Davy. Mais si j’avais été ce que je veux dire, il ne