Page:Dickens - David Copperfield, traduction Pichot, 1851, tome 3.djvu/345

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vère dont il faut que les autres profitent comme vous en avez profité vous-même. »

Elle terminait en me recommandant à Dieu, qui avait appelé à lui ma compagne bien aimée.

« Il vous reste, » ajoutait-elle, « une sœur tendre qui vous chérit toujours, dont la pensée vous accompagne partout, fière de ce que vous avez fait, beaucoup plus fière de ce qu’il vous est réservé de faire. » 

Je serrai la lettre dans mon sein et réfléchis à l’accablement qui pesait sur moi naguères. Bientôt j’entendis expirer l’écho lointain des voix, je vis s’obscurcir le paisible nuage du soir ; à mes yeux s’effacèrent les teintes de la vallée, et la neige dorée des hautes cimes se confondit avec la pâleur de la voûte céleste. Mais en vain la nuit descendait sur toute la nature, je sentais qu’elle se dissipait, au contraire, dans mon âme, et que tous ses fantômes s’évanouissaient… Agnès, il n’y a pas de nom pour la reconnaissance qu’en ce moment j’éprouvai pour vous, et vous me devîntes plus chère que vous ne l’aviez été jusque-là !

Je relus maintes fois la lettre d’Agnès. Je lui écrivis avant de me coucher ; je lui dis qu’elle était venue à mon secours lorsque j’avais le plus cruellement souffert ; que sans elle