cette sortie contre la société de son frère que je ne m’avisai pas de justifier, quoique appartenant moi-même à la corporation qui excitait cette longue rancune. Miss Lavinia continua donc :
« — M. Copperfield, ma sœur Clarissa et moi, nous avons examiné et pesé consciencieusement cette lettre. Et nous avons fini par la montrer à notre nièce afin de la discuter avec elle. Nous ne doutons pas que vous ne pensiez l’aimer beaucoup…
» — Si je le pense, ah !… » m’écriai-je avec transport…
Mais Miss Clarissa m’adressant un coup d’œil (un coup d’œil d’oiseau, de canari), comme pour me prier de ne pas interrompre l’oracle, je demandai pardon.
« — L’affection, » dit Miss Lavinia sollicitant du regard l’approbation de sa sœur qui la lui accorda par un signe de tête à chaque clause, « — l’affection mûre, l’hommage d’un cœur dévoué, ne s’exprime pas facilement. Sa voix est peu élevée ; elle est modeste et timide ; elle se cache en attendant l’opportunité, et attend toujours. Tel est le fruit mûr. Quelquefois une vie entière s’écoule et le trouve mûrissant encore, en secret, à l’ombre. »