Page:Dickens - Dombey et fils, 1881, tome 2.djvu/198

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habiller par Burgess et Cie ; souvent, quand je suis seul, je pleure comme un veau. Je vous le jure, capitaine, ce sera un plaisir pour moi que de revenir demain, que de revenir après-demain, que de revenir cinquante fois. »

En disant ces mots, M. Toots donna au capitaine une vigoureuse poignée de main ; puis, dissimulant son trouble, autant qu’il pouvait le faire, pour le cacher aux regards pénétrants de Coq-Hardi, il alla rejoindre le célèbre personnage dans la boutique. Coq-Hardi, tout disposé à être jaloux de l’ascendant qu’il exerçait sur M. Toots, lança au capitaine Cuttle un regard qui n’était rien moins que favorable, lorsque celui-ci dit adieu à M. Toots ; néanmoins, il suivit son protecteur sans autre manifestation de sa mauvaise humeur, laissant le capitaine plongé dans sa tristesse, et Robin le Rémouleur ravi jusqu’au huitième ciel de l’honneur qu’il avait eu de contempler, pendant près d’une heure, le vainqueur du célèbre boxeur du Shropshire.

Il y avait déjà longtemps que Robin le Rémouleur ronflait sous le comptoir, que le capitaine était encore assis regardant fixement la flamme du foyer ; il y avait déjà longtemps qu’il n’y avait plus de feu, que le capitaine était assis regardant fixement les chenêts, la tête traversée de mille pensées, impuissantes, hélas ! au sujet de Walter et du vieux Sol. La chambre d’en haut, exposée à tous les vents, n’était pas faite pour lui rendre le calme, et le lendemain matin, quand le capitaine se leva, il était triste et fatigué.

Aussitôt que les bureaux furent ouverts dans la Cité, il sortit pour se rendre au comptoir de Dombey et fils. Mais, ce jour-là, on n’ouvrit pas les fenêtres du petit aspirant de marine. Robin le Rémouleur, par les ordres du capitaine, laissa les volets fermés et la maison ressemblait à une maison mortuaire.

Le hasard voulut que M. Carker entrât dans le bureau au moment où le capitaine arrivait à la porte. Grave et silencieux, le capitaine l’aborde ; M. Carker le salue et Cuttle prend la liberté de l’accompagner jusque dans son cabinet.

« Eh bien ! capitaine Cuttle, dit M. Carker en se mettant devant la cheminée dans sa posture accoutumée et en gardant son chapeau sur la tête, ça va mal !

— Vous avez reçu la confirmation des nouvelles qui étaient dans le journal d’hier, monsieur ? dit le capitaine.

— Oui, répond M. Carker, nous les avons reçues. Les détails sont précis ; les assureurs subissent un dommage