Page:Dickens - Dombey et fils, 1881, tome 2.djvu/248

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liste se trouvait compris le cousin Feenix qui n’était pas encore retourné à Bade, au grand détriment de ses intérêts personnels ; un assortiment de muscadins de toute condition et de tout âge qui, à diverses reprises, avaient papillonné autour de la lumière de sa charmante fille ou de Mme Skewton elle-même, mais heureusement sans s’y être brûlé les ailes. Florence, sur l’ordre d’Edith, fut inscrite pour le dîner comme membre de la famille, bien que Mme Skewton eût eu l’idée, un moment, de l’éliminer. Florence avec un cœur sensible qui s’étonnait de cette hésitation, mais aussi avec un tact exquis pour deviner tout ce qui pouvait blesser son père, prit en silence sa part modeste de la fête.

La fête commença par l’apparition de M. Dombey dans le salon. Il avait une cravate d’une hauteur et d’une roideur extraordinaires, et se promena dans la pièce sans s’arrêter jusqu’au moment du dîner. À l’heure ponctuelle, arriva un directeur de la compagnie des Indes, jouissant d’une immense fortune : il portait un gilet qu’on eût dit taillé dans une bonne planche de sapin par un brave charpentier, quoiqu’en réalité il fut sorti de la main d’un tailleur et fait tout bonnement de nankin. Quand il arriva, il fut reçu par M. Dombey, qui était seul dans le salon. Second acte de la fête : M. Dombey envoie ses compliments à Mme Dombey en l’avertissant de l’heure exacte à la pendule ; ensuite, le directeur de la compagnie des Indes, laissant tomber la conversation et M. Dombey n’étant pas homme à la relever, ils regardèrent le feu en attendant qu’on vînt les tirer d’embarras. Ce fut Mme Skewton qui arriva à leur secours, et le directeur, débutant par un pas de clerc, la prit pour Mme Dombey, et lui fit en cette qualité les compliments les plus flatteurs.

Ensuite on vit entrer un directeur de la Banque, réputé assez riche pour avoir le moyen d’acheter tout, même le genre humain, s’il lui prenait fantaisie de le faire coter à la Bourse : ce qui ne l’empêchait pas d’être l’homme le plus modeste en paroles : il poussait même la modestie jusqu’à la vanité ; il parla de sa petite maison à Kingston sur la Tamise, où il pourrait offrir à Dombey un lit et une côtelette, s’il voulait bien venir le voir.

« Quant aux dames, dit-il, lorsqu’on vit comme moi, dans la retraite, il serait présomptueux de leur faire une invitation ; mais si Mme Skewton et sa fille, Mme Dombey, passaient jamais par là, elles lui feraient un grand honneur en daignant