Page:Dickens - L’Abîme, 1918.djvu/110

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lèvres dans un baiser qu’il venait d’y imprimer.

— Laissez-moi, — dit-elle, — laissez-moi me retirer, Monsieur Vendale.

— Appelez-moi George.

Marguerite laissa la tête du jeune homme se reposer sur son sein. Son cœur enfin s’élançait vers lui.

— George ! — murmura-t-elle.

— Dites-moi que vous m’aimez.

Ses bras enlacèrent le cou de George, sa bouche toucha la joue brûlante du jeune homme, et elle murmura ces mots délicieux :

— Je vous aime !

Il y eut un moment de silence, bientôt troublé par le bruit de la porte de la maison qui s’ouvrait et se refermait. Ce bruit arriva par bonheur aux oreilles distraites des deux amants, dans le silence de cette soirée d’hiver, et Marguerite se leva en sursaut.

— Laissez-moi partir, — dit-elle, — c’est lui ! Elle sortit précipitamment de la chambre et toucha, en passant, l’épaule de Madame Dor. La bonne dame s’éveilla avec un ronflement terrible, regarda par-dessus son épaule gauche, par-dessus son épaule droite, puis sur ses genoux. Elle n’y découvrit ni bas, ni laine, ni aiguille. Cependant les pas d’Obenreizer retentissaient dans l’escalier.

— Mon Dieu ! — dit Madame Dor, s’adressant au poêle.

Vendale ramassa les bas et le peloton, et jeta le tout à Madame Dor.

— Mon Dieu ! — répéta-t-elle, — tandis que cette avalanche s’engloutissait dans son vaste giron.