Page:Dickens - L’Abîme, 1918.djvu/113

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selle Obenreizer s’était changée en un sentiment plus profond… plus tendre ?

— L’appellerons-nous le sentiment de l’amitié, Monsieur Vendale ?

— Donnez-lui le nom d’amour… et vous serez plus près de la vérité.

Obenreizer fit un bond hors de son fauteuil. Le battement étrange, à peine perceptible, qui était chez lui le plus sûr indice d’une prochaine colère, se fit voir sur ses joues.

— Vous êtes le tuteur de Mademoiselle Marguerite, — continua Vendale, — je vous demande de m’accorder la plus grande des faveurs, la main de votre nièce….

Obenreizer retomba sur sa chaise.

— Monsieur Vendale, — dit-il, — vous me pétrifiez.

— J’attendrai, — fit Vendale, — j’attendrai que vous soyez remis.

— Bon ! — murmura Obenreizer, — un mot avant que je revienne à moi ! Vous n’avez rien dit de tout ceci à ma nièce.

— J’ai ouvert mon cœur tout entier à Mademoiselle Marguerite, et j’ai lieu d’espérer…

— Quoi ! — s’écria Obenreizer, — vous avez fait une pareille demande à ma nièce sans avoir pris mon consentement… Vous avez fait cela ?

Il frappa violemment sur la table et, pour la première fois, perdit toute puissance sur lui-même.

— Quelle conduite est la vôtre ! — s’écria-t-il, — et comment, d’homme d’honneur à homme d’honneur, pourriez-vous la justifier ?

— Ma justification est bien simple, — repartit Ven-