Page:Dickens - L’Abîme, 1918.djvu/187

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donne aucune raison. Je demande à ces Messieurs s’ils prétendent attaquer mon honneur ? Point de réponse. Où sont leurs preuves contre moi ? Point de réponse encore. Ce que j’en dois penser ? Cette fois on me répond ! « M. Obenreizer est libre de penser ce que bon lui semble et ce qu’il pensera n’importe guères à Defresnier et Compagnie. » Et voilà tout.

— Voilà tout, — dit le notaire.

Et il prit une forte prise de tabac.

— Cela suffit-il, Monsieur ?

— Non, vraiment, — fit Maître Voigt. — La maison Defresnier et Compagnie est de cette ville, très-estimée, très-respectée. Mais la maison Defresnier et Compagnie n’a point le droit de détruire sans raison la réputation d’un homme. Vous pourriez répondre à une accusation. Mais que répondrez-vous à des gens qui ne disent rien ?

— Justement, mon cher maître. Votre équité naturelle vient de définir en un mot la cruelle situation où l’on m’a placé. Et si encore ce malheur était le seul !… Mais vous savez quelles en ont été les suites ?

— Je le sais, mon pauvre garçon, — fit le notaire en remuant la tête d’un air compatissant, — votre pupille se révolte contre vous.

— Se révolte !… c’est un mot bien doux, — reprit Obenreizer. — Ma pupille s’est élevée avec horreur contre moi ; elle s’est soustraite à mon autorité, et s’est réfugiée avec Madame Dor chez cet homme de loi Anglais, Monsieur Bintrey, qui répond à nos sommations de revenir et de se soumettre que jamais elle n’en fera rien.