Page:Dickens - L’Abîme, 1918.djvu/23

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éloquence, — c’est pourquoi je demande dans les journaux une excellente femme de charge, pour prendre soin de la maison d’habitation de Wilding et Co., marchand de vins, Carrefour des Éclopés. Je veux rétablir chez moi quelques-uns de nos anciens usages et les rapports touchants qui existaient autrefois entre le patron et l’employé. Il me plaît de vivre à l’endroit où je gagne mon argent. Je veux, chaque jour, m’asseoir au haut bout de la table à laquelle les gens qui me servent viendront s’asseoir ; et nous mangerons ensemble du même rôti, du même bouilli, et nous boirons la même bière ; et mes serviteurs dormiront sous le même toit que Walter Wilding ! Et tous tant que nous sommes… Je vous demande pardon, Monsieur Bintrey, voilà que mes bourdonnements dans la tête vont me reprendre… je vous serais obligé si vous me conduisiez à la pompe.

Alarmé par l’excessive coloration du visage de son client, Bintrey ne perdit pas un moment pour l’entraîner dans la cour. C’était chose facile, car le cabinet dans lequel ils causaient tous les deux y donnait accès de plain-pied du côté de la maison d’habitation. Là, l’homme d’affaires, obéissant à un signe du malade, se mit à pomper de toutes ses forces. Wilding se lava la figure et la tête et but de bon cœur ; après quoi il déclara se sentir mieux.

— Voyez ! — dit Bintrey, — voilà ce que c’est que de vous laisser échauffer par vos bons sentiments !

Ils regagnèrent le bureau, et tandis que Wilding s’essuyait, l’homme de loi le grondait toujours.