Page:Dickens - L’Abîme, 1918.djvu/96

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Il étendit la main vers les siennes. Elle la prit avec douceur.

— Vous ne mourrez point, cher Monsieur Wilding.

— C’est ce que Monsieur Bintrey m’assure ; mais depuis que je suis couché, j’éprouve le même calme, le même repos que jadis, quand j’étais heureux, au moment où j’allais dormir. En vérité, je m’endors aussi doucement que dans mon enfance, lorsque vous me berciez, Sally, vous en souvenez-vous ?

Après un instant de silence, il se mit à sourire.

— Je vous en prie, nourrice, embrassez-moi, — dit-il.

Sa raison l’abandonnait tout à fait, il se croyait dans le dortoir de l’Hospice.

Sally, accoutumée naguère à se pencher sur les pauvres petits orphelins, se pencha vers ce pauvre homme, orphelin aussi, et le baisant au front :

— Que Dieu vous protège ! — murmura-t-elle.

Il rouvrit les yeux.

— Sally, — dit-il, — ne me remuez pas. Je suis très bien couché, je vous assure… Ah ! je crois que mon heure est venue. Je ne sais quel effet ma mort va produire sur vous, Sally, mais sur moi-même…

Il perdit connaissance… et il mourut….