Page:Dickens - La Petite Dorrit - Tome 1.djvu/145

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formes), était à vendre pour un simple billet de vingt livres sterling, attendu qu’il avait pris le mors aux dents la semaine passée, malgré les efforts de Mme la capitaine Barbary, de Chattenham, écuyère peu capable de monter un cheval de race, et qui dans son dépit avait la sottise de le mettre en vente à un rabais ridicule ; disons le mot, de le donner pour rien. Plornish entra seul dans cette cour, laissant son patron dans la rue ; il y rencontra un gentleman à pantalon de drap brun très étroit, coiffé d’un chapeau un peu râpé, armé d’une petite canne à bec-de-corbin, et orné d’une cravate bleue (le capitaine Maron, du Gloucestershire, ami intime du capitaine Barbary), qui se trouvait là par hasard, par pure obligeance, tout prêt à raconter l’histoire de cet admirable hongre à tous les fins connaisseurs que les annonces pourraient conduire vers l’écurie pour profiter sans retard d’une occasion incroyable. Ce gentleman qui se trouvait justement le créancier de l’affaire Tip, renvoya M. Plornish à son avoué, refusa de traiter avec M. Plornish, ou même de lui permettre de rester dans la cour, à moins que M. Plornish ne s’y montrât avec un billet de vingt livres sterling ; alors seulement le capitaine Maron, jugeant d’après les apparences que M. Plornish avait des intentions sérieuses, consentirait à s’entretenir avec lui. Profitant de cet avis, M. Plornish se retira pour conférer avec son patron, et revint avec la lettre de créance indispensable. Alors le capitaine Maron lui dit :

« Eh bien, combien vous faut-il de temps pour payer les vingt guinées qui restent ? Tenez, je vous accorde un mois. »

Cette offre n’étant pas acceptée, le capitaine Maron ajouta :

« Tenez, voici tout ce que je puis faire. Vous me remettrez un bon billet à quatre mois, payable chez un banquier, pour le reste ! »

Voyant que cela ne lui convenait pas davantage, le capitaine Maron poursuivit :

« Eh bien donc ! voici mon dernier mot. Vous me donnerez encore dix guinées comptant, et je vous tiens quitte. »

Voyant que cela ne pouvait pas aller non plus, le capitaine Maron reprit :

« Tenez, finissons-en et n’en parlons plus. Votre ami n’a pas bien agi avec moi, mais n’importe. Ajoutez encore cinq guinées et une bouteille de vin, et c’est une affaire réglée. Si cela vous va, dites oui ; sinon, qu’il n’en soit plus question. »

Enfin, Plornish ayant signifié qu’il ne voulait pas non plus de cette dernière condition, le capitaine Maron termina en disant :

« Allons, passez-moi votre billet, alors ! » et, conformément à la première offre, donna une quittance pour solde de tout compte ; et libéra le prisonnier.

« Monsieur Plornish, dit Arthur, je compte sur vous, s’il vous plaît, pour me garder le secret. Si vous voulez bien annoncer au jeune homme qu’il est libre et que vous avez été chargé de transiger avec son créancier par une personne qu’il ne vous est pas