moins humide, et Mollusque jeune s’en retourna chez lui en cabriolet, fumant faiblement un petit cigare ; quant à cet équivoque Gowan, il partit à pied, accompagné de son chien qui ne valait guère mieux. Toute la journée, Chérie avait pris les peines les plus aimables pour être gracieuse avec M. Clennam, mais Clennam s’était tenu sur la réserve depuis le déjeuner, c’est-à-dire se serait tenu sur la réserve, s’il avait été amoureux de Chérie.
Lorsque Arthur fut remonté dans sa chambre et se fut jeté encore une fois dans le fauteuil auprès de la cheminée, M. Doyce frappa à sa porte, la bougie à la main, pour lui demander comment et à quelle heure il comptait retourner à Londres le lendemain. Cette question réglée, Clennam dit un mot à M. Doyce à propos de ce Gowan, qui lui aurait trotté dans la tête s’il avait été son rival :
« Je n’ai pas grande idée de l’avenir de ce peintre-là.
— Ni moi non plus, » répliqua Doyce.
M. Doyce se tenait debout, son bougeoir dans une main, l’autre main dans sa poche, regardant fixement la flamme de la bougie, et on lisait sur sa physionomie paisible qu’il devinait que Clennam avait encore quelque chose à lui dire.
« J’ai trouvé mon digne ami un peu changé, pas à l’avantage de sa belle humeur, depuis ce matin, à partir de la visite de ce monsieur, dit Clennam.
— En effet, répondit Doyce.
— Mais la visite n’a pas produit le même effet sur sa fille ? ajouta Clennam.
— Non, » répondit Doyce.
Il y eut un silence des deux côtés. M. Doyce, les yeux toujours fixés sur la flamme de sa bougie, continua lentement :
« Le fait est que M. Meagles a deux fois emmené sa fille à l’étranger, dans l’espoir de la détacher de M. Gowan. Il la croit disposée à avoir du goût pour lui et il a des doutes pénibles (je les partage, comme je suis sûr que vous le faites) sur le bonheur qui pourrait résulter d’un pareil mariage.
— Il y… » Clennam étrangla, toussa et s’arrêta.
« C’est ça, vous vous serez enrhumé, dit Daniel Doyce, mais sans le regarder.
— Il y a promesse de mariage échangée entre les deux jeunes gens, naturellement ? dit Clennam d’un ton insouciant.
— Non. On m’a positivement dit que non. Le monsieur a demandé qu’on lui fît une promesse de ce genre, mais la demoiselle a refusé. Depuis le récent retour des Meagles, notre ami a bien voulu consentir à recevoir M. Gowan une fois par semaine ; mais voilà tout. Pour rien au monde Minnie ne voudrait tromper son père ou sa mère. Vous avez voyagé avec eux et vous avez pu reconnaître que cette famille est unie par des liens d’affection qui ne sont pas pour finir de sitôt. Je suis certain qu’il n’y a rien de plus entre Mlle Minnie et M. Gowan que ce que nous voyons.