Page:Dickens - La Petite Dorrit - Tome 2.djvu/22

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
 Les corrections sont expliquées en page de discussion

mais il n’en vaut pas la peine… heureusement pour lui. Comment va sa femme, Amy ? tu sais cela, sans doute ? Tu t’arranges toujours de manière à savoir ces choses-là, toi.

— Elle va mieux, Édouard. Mais ils ne repartent pas aujourd’hui.

— Oh, ils ne repartent pas aujourd’hui ? Voilà qui est encore bien heureux pour cet animal, dit Tip ; car, autrement, j’aurais pu lui demander une explication.

— On a pensé qu’il valait mieux qu’elle se tînt tranquille aujourd’hui, et ne s’exposât que demain aux fatigues et aux cahots du voyage.

— De tout mon cœur. Mais tu en sais aussi long que si tu venais de lui servir de garde-malade. Tu ne retombes pas… (Mme  Général n’est pas là pour m’entendre) ; tu ne retombes pas dans tes vieilles habitudes, hein, Amy ? »

Tip, en faisant cette question, lançait à Fanny et à son père un regard malin et observateur.

« Je suis seulement allée lui demander si je pouvais lui être bonne à quelque chose, mon cher Tip, répliqua la petite Dorrit.

— Je te prie encore une fois de ne pas m’appeler Tip, petite étourdie que tu es, répliqua ce jeune gentleman en fronçant les sourcils ; c’est encore une de ces vieilles habitudes dont tu feras bien de te débarrasser.

— Je l’ai dit sans y penser, cher Édouard. J’oubliais. Autrefois ce nom me venait si naturellement qu’il m’a semblé tout à l’heure que c’était ton vrai nom.

— Oh oui ! s’écria Mlle  Fanny. Cela me venait si naturellement ! C’était ton vrai nom ! et le reste. Veux-tu bien te taire, petite évaporée ! Je sais parfaitement bien pourquoi tu t’intéresses à cette Mme  Gowan. Tu ne m’empêcheras pas d’y voir clair, va !

— Je ne veux pas du tout t’en empêcher, je t’assure. Ne te fâche pas.

— Que je ne me fâche pas ! c’est facile à dire ! s’écria Mlle  Fanny avec un geste irrité. Il me faudrait une patience que je n’ai pas ! (Hélas ! ce n’était que trop vrai.)

— Fanny, demanda M. Dorrit en relevant les sourcils. Que voulez-vous dire ? Expliquez-vous, je vous prie.

— Oh ! ne faites pas attention, papa, répliqua Mlle  Fanny. C’est peu de chose. Amy me comprend bien. Elle connaissait cette Mme  Gowan, ou du moins elle en avait entendu parler avant notre rencontre d’hier. Elle fera tout aussi bien de ne pas le nier.

— Ma fille, dit M. Dorrit en se tournant vers la coupable, votre sœur est-elle… hem !… autorisée à faire cette étrange assertion

— Quelque bonne et douce que nous soyons, poursuivit Mlle  Fanny sans laisser à sa sœur le temps de répondre, nous ne nous amusons pas à nous glisser dans la chambre des gens, au risque de