Page:Dickens - La Petite Dorrit - Tome 2.djvu/355

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— Oh ! fit Pancks. Est-ce tout ?

— Non, monsieur ; non, monsieur, ce n’est pas tout. Vous aurez la bonté, monsieur Pancks, de vous remettre à pressurer la cour du Cœur-Saignant, pas plus tard que lundi matin.

— Oh ! répéta Pancks. Ne sera-ce pas trop tôt ? Je l’ai mise à sec aujourd’hui.

— Allons donc, monsieur ! Vos recettes ont baissé ; baissé ; baissé.

— Oh ! fit encore le factotum en contemplant son patron qui avalait d’un air bénévole une partie de son mélange. Est-ce tout ?

— Non, monsieur ; non, il y a autre chose. Je ne suis pas du tout content de ma fille, monsieur Pancks ; pas du tout content. Non-seulement elle va trop souvent demander des nouvelles de Mme  Clennam, de Mme  Clennam, dont la situation, au point de vue financier, n’est plus de nature à satisfaire tout le monde, satisfaire tout le monde… mais, si je ne me trompe, elle va, monsieur Pancks, jusqu’à visiter Arthur Clennam dans sa prison, dans sa prison.

— Vous savez qu’il est malade. Elle le fait sans doute par bonté.

— Peuh, peuh, monsieur Pancks ! Il ne s’agit pas de ça, il ne s’agit pas de ça. Ce n’est pas son affaire. Je ne puis pas le permettre. Qu’il paye ses dettes et sorte de prison ; paye ses dettes et sorte de prison. »

Bien que les cheveux du Remorqueur fussent aussi hérissés que des fils de fer, il se servit de ces deux mains afin de leur imprimer une direction encore plus perpendiculaire, et adressa à son propriétaire un sourire hideux.

« Vous aurez donc l’obligeance, monsieur Pancks, d’annoncer à ma fille que je ne saurais le permettre, que je ne saurais le permettre, continua le Patriarche avec beaucoup de mansuétude.

— Oh ! fit Pancks. Ne pourriez-vous pas lui dire ça vous-même ?

— Non, monsieur ; non, Vous êtes payé pour le dire (ce vieux nigaud, dans sa stupidité, ne put résister à la tentation de répéter sa mauvaise plaisanterie)… Vous êtes payé pour le dire et vous devez le dire pour qu’on vous paye.

— Oh !… Est-ce tout ?

— Non, monsieur. Il me semble, monsieur Pancks, que vous-même vous passez trop de temps par là, trop de temps par là. Je vous recommande, monsieur Pancks, de ne plus songer à vos pertes ni à celles des autres, mais de vous occuper de mes affaires, de vous occuper de mes affaires. »

Le Remorqueur accueillit ce sage conseil par une émission si brusque, si rapide et si bruyante de son monosyllabe « oh ! » que le lourd Patriarche lui-même dirigea avec assez de vivacité ses grands yeux bleus vers lui. M. Pancks, après s’être soulagé par un reniflement non moins accentué, répéta :

« Est-ce tout ?