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GRILLON DU FOYER.

d’un regard la place de la masure de Caleb Plummer, ce n’aurait été sans doute, que pour en approuver la démolition pour cause d’embellissement de la rue ; car elle faisait sur la maison de Gruff et Tackleton l’effet d’une excroissance, telle qu’une verrue sur un nez, un coquillage sur la carène d’un navire, un clou sur une porte, un champignon sur la tige d’un arbre. Mais c’était de ce germe qu’était sorti le tronc superbe de Gruff et Tackleton. Sous ce toit crevassé, l’avant-dernier Gruff avait commencé, sur une petite échelle, la fabrique de joujoux pour des garçons et des filles, maintenant devenus vieux, qui en avaient joué, qui les avaient brisés et qui avaient été dormir.

J’ai dit que Caleb et sa pauvre fille aveugle habitaient là, mais j’aurais dû dire que Caleb habitait là et que sa fille habitait ailleurs ; elle habitait une demeure enchantée par le talent de Caleb, où la pauvreté, le dénuement, et les soucis ne pénétraient jamais. Caleb n’était pas sorcier, mais il possédait là son art magique réservé aux hommes : la magie du dévouement, et l’amour sans bornes. La nature avait été sa seule maîtresse, et lui avait enseigné à produire tous ses enchantements.

La fille aveugle n’avait jamais su que le plafond était sale, les murs décrépits et lézardés, et laissant à l’air des passages de plus en plus nombreux ; que les solives vermoulues étaient prêtes à s’effondrer ; que la rouille mangeait le fer, la pourriture le bois, et la moisissure