Page:Dickens - Les Grandes Espérances, Hachette, 1896, tome 2.djvu/163

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folie, dans le parloir de Compeyson, à une heure très-avancée de la soirée, n’ayant sur lui qu’une chemise de flanelle et ses cheveux tout mouillés, il dit à la femme de Compeyson :

« — Sally, Elle est actuellement près de moi là-haut, et je ne puis me débarrasser d’elle ; elle est tout en blanc, avec des fleurs blanches dans les cheveux, et elle est horriblement folle, et elle tient un linceul dans ses bras, et elle dit qu’elle le jettera sur moi à cinq heures du matin.

« — Mais fou que vous êtes, dit Compeyson, ne savez-vous pas que celle dont vous voulez parler a une forme humaine ? et comment pourrait-elle être entrée là-haut sans passer par la porte, par la fenêtre ou par l’escalier ?

« — Je ne sais pas comment elle y est venue, dit Arthur en frissonnant d’horreur, mais elle est dans le coin au pied du lit, horriblement folle, et à l’endroit où son cœur est brisé, où vous l’avez brisé, il y a des gouttes de sang. »

« Compeyson parlait haut, mais en réalité il était lâche.

« — Monte avec ce radoteur malade, dit-il à sa femme ; et, vous, Magwitch, donnez-lui un coup de main, voulez-vous ?

« Mais, quant à lui, il ne bougea pas.

« La femme de Compeyson et moi, nous reconduisîmes Arthur pour le remettre au lit, et il divagua d’une manière horrible.

« — Regardez-la donc !… criait-il, en montrant un endroit où nous n’apercevions absolument rien, elle secoue le linceul sur moi !… Ne la voyez-vous pas ?… Voyez ses yeux !… N’est-ce pas horrible de la voir toujours folle ? »