Page:Dickens - Les Papiers posthumes du Pickwick Club, Hachette, 1893, tome 2.djvu/152

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d’être profondément attachées à quelqu’un, ou parfaitement disposées à s’attacher au premier venu, si l’occasion s’en présentait ; mais comme aucune de ces jeunes ladies n’était miss Arabella Allen, ces renseignements laissaient Sam précisément aussi instruit qu’il l’était auparavant.

Il poursuivit sa route à travers les Dunes, en luttant contre un vent violent, et, chemin faisant, il se demandait si, dans ce pays, il était toujours nécessaire de tenir son chapeau des deux mains. Enfin il arriva dans un endroit ombragé, où se trouvaient répandues plusieurs petites villas, d’une apparence tranquille et retirée. Au fond d’une longue impasse, devant une porte d’écurie, un groom, en veste du matin, s’occupait à flâner, en société d’une pelle et d’une brouette ; moyennant quoi, il se persuadait apparemment à lui-même qu’il faisait quelque chose d’utile. Nous ferons remarquer, en passant, que nous avons rarement vu un groom auprès d’une écurie, qui, dans ses moments de laisser aller, ne fût pas plus ou moins victime de cette singulière illusion.

Sam pensa qu’il pourrait parler avec ce groom, aussi bien qu’avec tout autre, et cela d’autant plus, qu’il était fatigué de marcher, et qu’il y avait une bonne grosse pierre, juste en face de la porte. Il se dandina donc jusqu’au fond de la ruelle, et, s’asseyant sur la pierre, ouvrit la conversation avec l’admirable aisance qui le caractérisait.

« Bonsoir, vieux, dit-il.

— Vous voulez dire bonjour ? répliqua le groom, en jetant à Sam un regard rechigné.

— Vous avez raison, vieux, je voulais dire bonjour. Comment vous va ?

— Eh ! je ne me sens guère mieux, depuis que vous êtes là.

— C’est drôle, vous paraissez pourtant de bien bonne humeur, vous avez la mine si guillerette que ça réjouit le cœur de vous voir. »

À cette plaisanterie, le groom rechigné parut plus rechigné encore, mais non pas suffisamment pour produire quelque impression sur Sam. Celui-ci lui demanda immédiatement, et avec un air de grand intérêt, si le nom de son maître n’était pas un certain M. Walker.

« Non, répondit le groom.

— Ni Brown, je suppose.

— Non.