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Page:Dickens - Les Papiers posthumes du Pickwick Club, Hachette, 1893, tome 2.djvu/363

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bac, Perker mon garçon. Avez-vous jamais rien vu de pareil, hein ?

— Que voulez-vous dire ? demanda M. Pickwick.

— Ma foi ! je pense que toutes les filles ont perdu la tête. Vous direz peut-être que cela n’est pas bien nouveau, mais c’est vrai néanmoins.

— Eh ! mon cher monsieur, dit Perker, est-ce que vous êtes venu à Londres tout exprès pour nous apprendre cela ?

— Non, non, pas tout à fait ; quoique ce soit la principale cause de mon voyage. Comment va Arabelle ?

— Très-bien, répondit M. Pickwick ; et elle sera charmée de vous voir, j’en suis sûr.

— La petite coquette aux yeux noirs ! J’avais grandement idée de l’épouser moi-même un de ces beaux jours, mais néanmoins je suis charmé de cela, véritablement.

— Comment l’avez-vous appris ? demanda M. Pickwick.

— Oh ! par mes filles naturellement. Arabelle leur a écrit avant-hier qu’elle s’était mariée sans le consentement du père de son mari, et que vous étiez allé pour le lui demander, quand son refus ne pourrait plus empêcher le mariage, et tout cela. J’ai pensé que c’était un bon moment pour donner une petite leçon à mes filles, pour leur faire remarquer quelle chose terrible c’était quand les enfants se mariaient sans le consentement de leurs parents, et le reste. Mais baste ! je n’ai pas pu faire la plus légère impression sur elles. Elles trouvaient mille fois plus terrible qu’il y eût eu un mariage sans demoiselles d’honneur, et j’aurais aussi bien fait de prêcher Joe lui-même. »

Ici le vieux gentleman s’arrêta pour rire, et quand il s’en fut donné tout son content, il reprit en ces termes :

« Mais ce n’est pas tout, à ce qu’il paraît. Ce n’est là que la moitié des complots et des amourettes qui se sont machinés. Depuis six mois nous marchons sur des mines, et elles ont éclaté à la fin.

— Qu’est-ce que vous voulez dire, s’écria M. Pickwick, en pâlissant. Pas d’autre mariage secret, j’espère.

— Non ! non ! pas tout à fait aussi mauvais que cela ; non.

— Quoi donc alors ! suis-je intéressé dans l’affaire ?

— Dois-je répondre à cette question, Perker ?

— Si vous ne vous compromettez pas, en y répondant, mon cher monsieur.

— Eh bien ! alors, dit M. Wardle en se tournant vers M. Pickwick ; eh bien alors, oui, vous y êtes intéressé.