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NICOLAS NICKLEBY.

y a des lois, et je ne serai pas condamné sans preuves. — Nous en avons, répondit Charles. Le nommé Snawley a fait hier au soir des aveux. — Et qu’ont de commun avec mes affaires le nommé Snawley et ses aveux ?

À cette question, émise avec une rare inflexibilité, Charles répondit en disant que, pour expliquer les motifs qui les faisaient agir, il fallait apprendre à Ralph les accusations dirigées contre lui, et comment on s’en était procuré des preuves irrécusables ; et Edwin, Tim Linkinwater et Newman Noggs entamèrent une conversation qui établit les faits suivants :

Une personne, qui ne voulait pas se montrer, avait solennellement affirmé à Newman que Smike n’était pas le fils de Snawley, et qu’elle était prête à le jurer en cas de besoin. Soupçonnant donc l’existence d’une conspiration, Newman et ses amis supposèrent naturellement que Ralph et Squeers en étaient les auteurs. N’ayant point de preuves, on consulta un avocat éclairé, qui conseilla de résister lentement à toutes tentatives faites pour enlever le jeune homme, d’embarrasser Snawley en l’amenant à se contredire, et de lui arracher un aveu formel ; mais le rusé Snawley avait déjoué toutes leurs manœuvres, jusqu’à ce que les circonstances lui imposassent l’obligation de dénoncer ses complices.

Quand Newman Noggs eut averti ses amis que Squeers avait eu un entretien secret avec Ralph, on fit suivre l’instituteur. Mais, comme ce dernier vivait retiré, et ne communiquait plus ni avec Ralph ni avec Snawley, on eût cessé d’épier ses démarches, si par hasard Newman ne l’avait aperçu un soir dans la rue avec l’usurier. Il les suivit, et les vit, à sa grande surprise, entrer en diverses maisons, où il y avait des logements à louer, et parcourir des tavernes tenues par des gens mal famés, dont plusieurs connaissaient Ralph et Squeers. Il prit des renseignements, et découvrit qu’ils cherchaient une vieille femme, dont le signalement s’accordait parfaitement avec celui de Peg Sliderskew.

On s’attacha aux pas de M. Squeers avec un redoublement de vigilance. Un agent de police s’installa dans une maison située en face de celle de l’instituteur et de Peg Sliderskew, et reconnut bientôt que ces deux personnages avaient entre eux de fréquentes entrevues.

Dans cet état de choses, on eut recours à Arthur Gride. Dans sa douleur, il avait divulgué le vol de papiers dont il était victime, mais il se refusait absolument à faire arrêter sa vieille femme de charge ; et il fut saisi d’une telle panique, à l’idée de déposer contre elle, qu’il s’enferma chez lui, et refusa de communiquer avec qui que ce fut.