Page:Dickens - Nicolas Nickleby, trad. Lorain, 1885, tome 1.djvu/178

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— Vous avez là, lui dit Nicolas avec douceur, un ami qui ne peut pas vous être d’un grand secours. Et comment vous trouvez-vous ici ? »

Il paraît qu’il l’avait suivi, sans le perdre de vue, tout le long du chemin. Il avait épié son sommeil pour être debout aussitôt que lui ; il s’était arrêté à chaque halte que Nicolas avait faite pour prendre quelque repos, toujours sans se montrer, tant il avait peur d’être renvoyé. Même alors, son intention n’était pas de se montrer encore, mais Nicolas s’était éveillé plus tôt qu’il ne l’avait espéré, et il n’avait pas eu le temps de se cacher à ses yeux.

« Pauvre garçon, dit Nicolas, votre triste sort ne vous permet guère d’espérer un autre ami, et celui que vous avez est pauvre et sans ressource comme vous.

— Me permettez-vous, dites, me permettez-vous d’aller avec vous ? demanda Smike d’une voix timide. Vous aurez en moi un serviteur fidèle et laborieux, je vous le promets. Je n’ai pas besoin d’habits, ajouta la pauvre créature en rajustant de son mieux ses haillons : ceux-ci peuvent aller encore. Je n’ai besoin que d’une chose, c’est d’être près de vous.

— Eh bien ! restez-y, s’écria Nicolas ; et que ce monde soit pour vous ce qu’il sera pour moi, jusqu’au jour où nous le quitterons l’un et l’autre pour un monde meilleur. Venez. »

En disant ces mots, il chargea sa valise sur ses épaules, et, prenant son bâton d’une main, tendit l’autre à son protégé ravi de bonheur ; puis ils sortirent de la vieille grange ensemble.


CHAPITRE XIV.

Où malheureusement il n’est question que de petites gens, et qui, par conséquent, ne peut avoir qu’un intérêt médiocre et vulgaire.

Il y a, dans le quartier de Londres où se trouve situé Golden-square, une rue abandonnée, déserte, déchue, bordée de deux rangées irrégulières de grandes maisons de maigre apparence qui ne semblent guère occupées, depuis quelques années, qu’à se dévisager les unes les autres. Les cheminées elles-mêmes ont pris un air triste et mélancolique à force de n’avoir rien de mieux à faire que de regarder les cheminées qui leur font face. Leurs faîtes