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il descendra plus bas, sera la plus légère, & celle où il s’enfoncera moins, sera la plus pesante.

Dans les Mémoires de l’Académie des Sciences 1699, M. Homberg donne un nouvel aréomètre, préférable en plusieurs choses à l’ancien. La construction de ce nouvel aréomètre consiste en un vaisseau de verre semblable à un petit matras, dont le cou est si menu qu’une goutte d’eau y occupe l’espace de cinq à six lignes. A côté de ce cou, il sort de la panse du vaisseau un petit tuyau de la même capacité que le cou, & de la longueur d’environ six lignes, parallèle au cou. Ce petit tuyau sert pour donner une sortie à l’air qui est dans le vaisseau, à mesure qu’on le remplit d’une liqueur. La raison pour laquelle le cou est si menu, est que par-là on peut plus aisément connoitre le vrai volume de la liqueur qui est entrée dans le vaisseau. L’on fait une marque sur son cou pour connoitre jusqu’où il doit être rempli. Il est bon de faire un peu évaser en entonnoir l’extrémité du cou, pour y verser plus facilement la liqueur.

L’usage de cet aréomètre est de le remplir d’un esprit acide jusqu’à la marque de son cou, de le peser ensuite avec un bon trébuchet, & de comparer le poids de cet esprit au poids d’un autre esprit. L’on y connoitra très-exactement de combien l’un pèsera plus que l’autre, parce qu’une goutte occupant l’espace de cinq ou six lignes dans le cou de cet aréomètre, si on y avoit versé la hauteur d’une ligne de trop ou trop peu, l’erreur ne seroit que d’un cinquième ou sixième de goutte sur toute la quantité qu’on auroit mesurée, ce qui est très-peu de chose, & cependant cela sera très sensible dans l’aréomètre, & très facile à corriger, en y ajoutant un peu de liqueur, s’il y en a trop peu, ou en frappant avec le doigt sur l’entonnoir du cou, s’il y en trop, ce qui fera sortir un peu de la liqueur par le petit bout du tuyau.

On peut avec cet instrument examiner non-seulement les esprits acides, mais aussi les sulfureux, & toutes sortes d’autres liqueurs; & comme les liqueurs sont sujètes à se dilater dans le chaud, & à se resserrer dans le froid, il entrera en hiver plus de liqueur dans l’aréomètre, qu’il n’en entrera en été. Pour remédier à cet inconvénient, M. Homberg a donné une table des liqueurs les plus considérables dont on se sert en Chimie, & il y marque combien ces liqueurs ont pesé dans la plus grande chaleur de l’été, & combien dans un temps où il geloit, afin que par-là on puisse savoir la différence de ces deux extrémités au temps dans lequel on veut se servir de l’aréomètre. Voici cette table.

L’aréomètre plein de mercure a pesé en été onze onces & sept grains, en hiver onze onces & trente-deux grains.

Plein d’huile de tartre, en été, 1 once, 3 drachmes, 8 gr.
En hiver, 1 once, 3. dr. 32 gr.
Plein d’esprit d’urine, en été, 1 once, 32 gr.
En hiver, 1 once, 43 gr.
Plein d’huile de vitriol, en été, 1 once, 3 dr. 58 gr.
En hiver, 1 once, 4 dr. 3 gr.
Plein d’esprit de nitre, en été, 1 once, 1 dr. 40 gr.
En hiver, 1 once, 1 dr. 70 gr.
Plein d’esprit de sel, en été, 1 once, 39 gr.
En hiver, 1 once, 47 gr.
Plein d’eau-forte, en été, 1 once, 1 dr. 38 gr.
En hiver, 1 once, 1 dr. 55 gr.
Plein de vinaigre distillé, en été, 7 dr. 55 gr.
En hiver, 7 dr. 60 gr.
Plein d’esprit de vin, en été, 6 dr. 47 gr.
En hiver, 6 dr. 61 gr.
Plein d’eau de rivière, en été, 7 dr. 53 gr.
En hiver, 7 dr. 57 gr.
Plein d’eau distillée, en été, 7 dr. 50 gr.
En hiver, 7 dr. 59 gr.

L’aréomètre vide pesoit une drachme vingt-huit grains.

Cette table marque le poids exact de ces liqueurs, en hiver & en été, & la vraie différence des unes aux autres ; mais elle ne marque pas la quantité de sel volatil acide, & la quantité de flegme dont ces esprits sont composés. Voyez la table que nous avons mise au mot Esprit, elle vous l’enseignera.

ARÉOPAGE. s. m. Tribunal ou Sénat des Athéniens. Aréopagus. Quelques-uns disent que c’étoit une espèce de palais, situé sur une colline dans la ville d’Athènes, & que c’étoit dans ce palais que le Sénat de cette fameuse ville s’assembloit. C’est l’idée qu’Hésychius en donne. D’autres appellent Aréopage, non-seulement le palais où s’assembloient les Aréopagites, mais un fauxbourg tout entier d’Athènes, ou la colline sur laquelle étoit placé ce palais. Le nom Aréopage semble favoriser cette opinion. Car il signifie proprement la colline de Mars, ou le rocher de Mars, πάγος colline, rocher, & Ἄρειος, qui appartient à Mars. On dit qu’il fut ainsi nommé, soit parce que l’Aréopage étoit situé dans un petit bourg où il y avoit un temple de Mars ; soit parce que la première cause qui y fut plaidée, fut celle de ce Dieu, accusé d’avoir tué le fils de Neptune, & renvoyé absous par douze autres Dieux ; ou bien parce qu’il y condamna Mars d’adultère. L’Auteur des Etymologies dit, parce que les Amazones filles de Mars campèrent là ; Æschyle, dans les Euménides, v. 690, parce que les Amazones portées sur cette colline, immolèrent à Mars un grand nombre de victimes. Ce Poëte paroit ignorer, ou ne pas croire tout ce que Pausanias, Liv. I. Libanius, Orat. 22 & 23. Servius, in Virg. Georg. Lib. I, v. 18, rapportent du procès de Mars & de Neptune. Il conte qu’après la guerre de Troye l’Aréopage prononça son premier arrêt contre Oreste. Mais Apollodore, Liv. III, remonte plus haut,& veut que cet illustre Sénat ait banni à perpétuité Céphale, pour avoir tue malheureusement sa femme d’un coup de flèche. Tourr. Cette Justice étoit en grande réputation chez les Grecs. Les Romains eux-mêmes en avoient une si haute opinion, qu’ils renvoyoient beaucoup de causes ambiguës à sa décision. L’Histoire vante en mille endroits l’intégrité de ceux qui composoient cet auguste & fameux tribunal.

Les Auteurs ne conviennent pas du nombre des Juges. Les uns en comptent 31, les autres 51, & d’autres jusqu’à 500. Il paroît que le nombre n’en étoit pas fixé, & qu’il étoit plus ou moins grand chaque année. Une inscription grecque rapportée par Volaterran, marque qu’ils étoient 500, ce qui doit s’entendre de l’année que cette inscription fut faite. D’abord cet auguste tribunal ne fut composé que de neuf Archontes sortis de charge. Leur salaire étoit égal, & payé des deniers de la république. On donnoit à chacun d’eux, trois oboles pour une cause. La Guill. Les Aréopagites étoient Juges perpétuels. Ils ne jugeoient que la nuit, afin d’avoir l’esprit plus recueilli, & plus attentif, & qu’aucun objet de haine, ou de pitié, ne pût surprendre leur religion. ☞ Par la même raison les Avocats étoient obligés d’y exposer leurs causes avec beaucoup de simplicité, sans employer ni exorde ni péroraison. Ils ne jugeoient d’abord que des causes criminelles. Ils eurent ensuite une juridiction plus étendue, cependant ils ne faisoient proprement que de débrouiller les affaires d’Etat.

M. Spon, qui étoit à Athènes en 1676, & qui examina les restes de cette fameuse ville, & en particulier de l’Aréopage, dit dans le second tome de ses voyages, que l’on voit encore les restes de l’Aréopage au midi du temple de Thésée, qui étoit autrefois au milieu de la ville, & qui est aujourd’hui hors des murs. On voit les fondemens de l’Aréopage en demi-cercle, & une esplanade de 140 pas environ, qui étoit proprement la talle de l’Aréopage. Il y a un tribunal taillé au milieu du roc, & des siéges aux deux côtés, sur lesquels les Aréopagites prenoient séance, exposés à l’air. Assez près font des grottes dans le roc, que l’on conjecture avoir servi de prison peur enfermer les criminels. Voyez les voyages de M. Spon, Tom. II, & Meursius, de Senatu Areopag. Tacite, Annal. Liv. II, ch. 55, l’appelle Areum Judicium. Jugement de Mars, & Juvénal, Sat. IX, v. 101,