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nir la permission de le couper, il falloit offrir au Dieu un sacrifice de quarante-quatre pièces de bétail, bœufs, chèvres & béliers. La coupe se faisoit durant le jour, & lorsqu’elle étoit faite, le prêtre qui y avoit assisté, mettoit à part ce qui en devoit revenir au Dieu, en se servant pour cela d’une pique. Solin qui en parle, c.33 dit que ce Dieu étoit le soleil, & il a raison. Théophraste l’avoit dit avant lui, Hist. Plant. 9, 5 ; mais comme c’étoit le Dieu suprême d’Ethiopie, les Auteurs Grecs ou romains que Pline avoit vus, lui donnèrent le nom de Jupiter, parce que telle étoit leur prévention pour leur Jupiter, qu’ils vouloient le trouver par-tout. Les trois Auteurs cités s’accordent à dire, que la part réservée pour le Dieu, ne manquoit pas de brûler d’elle-même ; & Théophraste ajoute que c’est un conte. Il sert à faire voir que les Prêtres de ce pays-là, aussi adroits que ceux de bien d’autres pays, savoient tromper les peuples, & faire entendre qu’il ne leur revenoit rien d’une offrande, dont ils faisoient secrétement leur profit. On coupoit le cinnamome pour en prendre l’écorce, qui est ce que nous appelons canelle.

ASSABLEMENT. s. m. Ce mot se trouve dans des Ordonnances & Arrêts du Conseil, & signifie un amas de sable qui forme quelquefois une île.

ASSABLER, ou ENSABLER. v. a. Remplir de sable. Arenâ cumulare. La mer avec le temps a assablé le port d’Aiguemortes, où S. Louis s’embarqua autrefois. Le plus grand soin que doit avoir un Ingénieur en bâtissant un port, c’est d’empêcher qu’il ne s’assable. La rivière de Loire assable souvent les prés qui sont sur les bords, les couvre de sable.

Ce mot vient de sable, ou sablin. Nicod, ou du latin sabulum.

Assabler, avec le pronom personnel, signifie, demeurer sur le sable, s’engraver, s’échouer. Allidere ad arenam, impingere in arenas. Quand on descend sur la Loire en été, ou sur le Volga, on s’assable à tout moment. Les grands vaisseaux qui s’assablent sur les bancs, y échouent.

ASSABLÉ, ÉE. part. pass. & adj. Rempli de sable ; arrêté sur le sable. Arenâ cumulatus, opertus, allisus in arena. Port assablé. Terres assablées. Vaisseau assablé.

☞ Ce mot assabler ne se dit point. On dit ordinairement ensabler ; encore n’est-il d’usage que sur les rivières.

ASSADOUX. s. m. C’est le Benjoin.

☞ ASSAFI, ou ASFI. Ville d’Afrique, dans la Mauritanie Tingitane, aujourd’hui nommée Safi. Voyez ce mot.

ASSA FŒTIDA, ou ASA FŒTIDA. s. f. Ce mot est latin. On l’appelle Merde du Diable, stercus Diaboli : apparemment à cause de son odeur d’ail, qui n’est pas agréable à tout le monde, quoique dans les Indes Orientales on l’emploie dans les ragoûts. Les Maréchaux l’ont mise en grande réputation pour les maladies des chevaux, principalement pour le farcin. Cette drogue est gommeuse & résineuse ; elle se fond sous les doigts comme la cire : son odeur est forte, & approche de celle de l’ail, elle est acre au goût, & sa couleur tire sur le roussâtre. On nous l’apporte des Indes Orientales. On en distingue deux espèces, l’une qui est en morceaux purs, & l’autre qui est en masse informe, moins pure & grumelée. Cette drogue s’emploie pour les maladies des femmes ; elle est résolutive, estimée contre la peste, & elle entre dans plusieurs compositions. On ne sait point de quelle plante elle sort ; & ce qu’en ont dit la plupart des Auteurs de Pharmacie, aussi-bien que les Botanistes, ne sont que des conjectures, auxquelles ont donné lieu différentes relations de voyageurs peu entendus & peu connoisseurs. Ceux qui croient, après quelques Anciens, qu’elle se tire du laser, ou laserpitium, seroient fort embarrassés s’ils étoient obligés d’éclaircir les questions & les disputes si souvent renouvellées parmi les Botanistes au sujet du vrai laser & de la gomme des Anciens, ou suc des Cyréniens, succus Cyrenaïcus. Il ne sera jamais possible de concilier les Commentateurs de Dioscoride & de Pline sur cela, tant qu’on n’aura que des conjectures à avancer. Quelques Modernes assurent qu’il y en a beaucoup en Perse, & qu’on la tire de deux sortes de plantes, dont l’une jette beaucoup de sarmens, comme le saule aquatique ; & l’autre a les feuilles semblables à celles du titimale. Théophraste dit que cette plante fuit les lieux cultivés, qu’elle s’y abâtardit, & que ses feuilles sont de couleur d’or. Cette gomme que les Apothicaires appellent laser, est ordinairement sophistiquée : & il étoit autrefois si difficile d’en recouvrer de la vraie qui venoit de la région Cyrénaïque, que Néron la gardoit en son trésor comme une chose précieuse : & Pline témoigne qu’elle étoit si recherchée de son temps, qu’on la vendoit au poids de l’argent. On appelle le Benjoin Assa dulcis.

ASSAGIR. v. a. Rendre sage. Erudire. L’âge assagit les hommes. Le temps, les afflictions l’ont assagi. Il est vieux, & ne peut trouver place que dans le discours familier, tout au plus.

ASSAHUAYE. s. m. Nom d’un fruit qui croît dans le royaume d’Issini. Assahuaya. Il est gros comme une médiocre prune, & de couleur rouge. Il y en a une autre espèce plus petite, & qui n’est pas plus grosse que le doigt. Ces fruits n’ont presque que la peau, & en les suçant, on n’y trouve qu’un goût douceâtre & insipide ; mais ils ont une telle qualité, qu’après en avoir seulement sucé un, l’on peut manger les oranges de les citrons les plus verts & les plus aigres, & boire le vinaigre le plus âpre, sans être incommodé. Ces choses ne paroissent plus au goût que des confitures très-délicates, tant est grande la force de cet alkali, qui sans doute auroit des propriétés merveilleuses dans la Médecine pour émousser la pointe des acides du corps humain, si on le séchoit & transportoit en Europe. P. Loyer, qui dit l’avoir éprouvé plusieurs fois. Description du royaume d’Issini.

ASSAILLANT, ANTE. subst. m. & f Qui attaque, qui donne brusquement sur un autre. Aggressor, Oppugnator. Dom Sanche dit dans le Cid : faites ouvrir le camp, vous voyez l’assaillant. Ce mot n’est plus guère en usage que dans les tournois & dans les carrousels, pour signifier celui qui combat contre le tenant, qui s’offre de soutenir le contraire de ce que le tenant avance dans un défi. L’assaillant & le tenant.

☞ Quand ce mot est synonyme d’assiégeant, il ne s’emploie qu’au pluriel. Les assaillans, pour dire ceux qui assiègent une place, qui y donnent un assaut. Redoubler l’ardeur des assaillans. Ablanc.

Assaillant se dit dans le figuré de celui qui attaque de paroles.

Je n’ai déjà que trop d’un si rude assaillant ;
Et si je me défends, ce n’est qu’en reculant. Mol.

ASSAILLIR. v. a. Aggredi, Adoriri, Oppugnare, Invadere. Ce mot est un peu vieux : mais comme de bons Auteurs l’emploient, on croit qu’on le peut employer aussi à leur imitation ; & principalement dans le figuré, dont on peut voir plus bas les exemples. Voici comme il se conjugue : J’assaille, tu assailles, il assaille ; nous assaillons, vous assaillez, ils assaillent. J’assaillois. J’assaillis. J’assaillirai. Que j’assaille. Que j’assaillisse. J’assaillirois. Il signifie, attaquer vigoureusement en se jettant dessus, & comme en sautant. Cette place fut assaillie & emportée en plein, jour : elle fut assaillie de nuit, & escaladée. On l’assaillit lorsqu’on s’y attendoit le moins. Mon ennemi m’assaillit en traître par derrière. Ce mot vient de adsalire, qui se trouve dans la Loi Salique, & ailleurs. Ménag. Nicod le dérive de afflare.

Assaillir, se dit aussi des armées & des particuliers. C’est un bon partisan, qui est allé assaillir les ennemis jusque dans leur camp, jusque dans leurs quartiers. J’ai vu commencer la querelle, c’est celui-là qui a assailli, qui a été l’aggresseur. On le dit aussi des bêtes. Les loups affamés viennent assaillir les hommes.

Assaillir, se dit aussi en Morale, en parlant de l’attaque des passions, des maladies, & des autres accidens de la fortune. Les esprits foibles se laissent assail-