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CHE

L’autre bras sont ceux appelés
Qui ont offices principaux
Sur gens d’armes, comme Maréchaux
Et Chevetains. Pélerinage de l’Ame.

Voyez Du Cange sur Villehardouin.

On appelle encore aujourd’hui Chevetains les Chefs de la Bourgeoisie de Bruges.

Ce mot vient de Capitaneus, d’où on a formé Chevetain, ou Cheftain, Capitaine, & comme on dit aujourd’hui Capitaine. Autrefois on disoit & écrivoit Chefvetaine.

CHEVETEAU. s. m. Grosse pièce de bois de travers où est engravée la couète sur laquelle tourne le tourillon d’un arbre de moulin : elle est posée sur une masse de maçonnerie.

CHEVÊTRAGE. s. m. C’étoit un droit que les Ecuyers du Roi prenoient à Paris sur le foin qui vient par eau. Capistragium. Ce droit est appelé en latin Chestragium, dans une Patente de saint Louis de l’an 1256.

CHEVÊTRE. s. m. Licou de monture. Ce mot est vieux, & vient de chef. Nicod. Capistrum. On dit encore enchevêtrer. Il signifie aussi un joug auquel on attache la tête des bœufs ou vaches. Gloss. sur Marot.

Chevêtre, en termes de Charpenterie, est la pièce de bois qui soutient les solives coupées à l’endroit de la cheminée, pour donner passage aux tuyaux, & empêcher que l’âtre ne pose sur du bois, à cause du danger du feu. Tigillum. Le chevêtre doit être éloigné de trois piés du feu.

Chevêtre, terme de Chirurgie. Espèce de bandage dont on se sert pour la fracture ou la luxation de la mâchoire inférieure. Acad. Fr.

CHEVEU, s. m. Poil, long, fin & délié, qui vient à la tête des hommes & des femmes. Capillus. Les Médecins font plusieurs distinctions des cheveux, & leur donnent des noms différens, mais seulement en grec & en latin. Ils appellent ceux des femmes comas, à cause du verbe κομεῖν, qui signifie attiffer & agencer soigneusement ; ceux des hommes, cæsaries a cædendo, parce qu’on les coupe souvent ; ceux de derrière la tête juba & crines ; ceux qui pendent derrière les oreilles, cincinni, c’est-à-dire, crépus & annelés. La Magdelaine essuya les piés du Seigneur avec ses cheveux. La force de Samson consistoit en ses cheveux. Les femmes qui se querellent, se prennent d’abord aux cheveux. Cheveux bien peignés. Compositi, comti.

Ce mot est dérivé de Capillus. Les cheveux paroissent de petits tuyaux, for unis & fort déliés ; mais quand on les regarde avec un microscope, on y voit des nœuds comme aux branches des arbres. Au bout par où ils tiennent à la tête, ils ont une petite bulbe qui reçoit le suc qui les nourrit, à l’autre bout ils se divisent quelquefois en deux branches : cela arrive lorsqu’on n’a pas soin de les faire faire de temps en temps ; & alors ils deviennent roux vers ce bout, parce que le suc qui les humecte, ne pouvant se communiquer aisément jusques-là, l’air & le soleil dessèchent & en brûlent l’extrémité. Les cheveux tombent & blanchissent plutôt sur le devant que sur le derrière de la tête, parce que le suc qui les entretient, leur est fourni plus longtemps par les parties du derrière de la tête.

☞ Les cheveux croissent en général plus longs & plus promptement chez les femmes que chez les hommes. Ils croissent de même beaucoup plus vîte chez les jeunes gens que chez les vieillards. On les regarde ordinairement comme des corps creux qui sont pénétrés par les sucs dans toute leur longueur. Quelques-uns croient pourtant qu’ils ne croissent que par la racine qui reçoit simplement sa nourriture de la bulbe ou oignon sur lequel le cheveu est implanté. La grandeur des cheveux dépend du suc propre à les nourrir, qui se trouve plus ou moins abondant aux uns qu’aux autres. Ils sont gros, ou fins & déliés, selon que les pores par où ils sont sortis, sont plus ou moins larges.

Lorsque les pores sont droits, les cheveux le sont aussi : quand ils sont courbes ou obliques, les cheveux sont frisés. Ceux qui sont d’un tempérament humide, ont le poil plus doux ; ceux qui sont secs, l’ont plus rude. La figure des cheveux nous paroît ronde ; mais le microscope nous fait voir qu’il y en a de triangulaires & de carrés, aussi-bien que de ronds. Cela vient de la configuration différente des pores par où ils ont passé, & dont ils prennent la figure. Les cheveux se peuvent fendre & séparer en deux ou trois parties, ce qui se voit à leurs extrémités, lorsqu’ils fourchent. Le microscope découvre encore qu’ils sont creux comme de petits tuyaux, ce qui est encore confirmé par la maladie appelée plica, à laquelle les Polonois sont sujets, & dans laquelle il sort du sang par l’extrémité des cheveux. La couleur des cheveux est différente suivant les pays, les tempéramens, les âges & la qualité de l’humeur qui les nourrit ; mais la vieillesse change ordinairement leur couleur, quelle qu’elle soit, en blanc, ce qui arrive par le peu d’humeur qui reste aux vieillards.

C’étoit un grand ornement parmi les Gaulois, que d’avoir de grands cheveux ; & de-là vient que la plus grande partie des Gaules s’appeloit Gallia comata. C’est pour cela que ceux qui quittoient le monde, pour se retirer dans les cloîtres, se faisoient raser les cheveux, pour montrer qu’ils renonçoient à tous les ornemens mondains ; & qu’ils faisoient vœu d’une sujetion absolue à leurs Supérieurs. Aussi Jule-César, lorsqu’il conquit les Gaules, faisoit abattre les cheveux des Gaulois en signe de soumission. Ovide le dit à sa maîtresse, qui se servoit de faux cheveux.

Nunc tibi captivos mittet Germania crines.
Culta triumphatæ munere gentis eris.

On imposoit aux vaincus la nécessité de se faire tondre, pour marque qu’ils étoient subjugués ; & c’est apparemment d’où est venue cette expression, il a été tondu, en parlant d’un homme qui est déchu de quelque prétention : & cette autre, je veux qu’on me tonde, qui est une peine qu’on s’impose, en cas que la chose qu’on affirme ne soit pas véritable. La raison est qu’on regardoit comme une honte d’être tondu. M. Auboux, dans sa véritable Pratique civile & criminelle, dit, qu’apparemment cette manière de parler est venue de ce qu’autrefois, quand un Magistrat trouvoit un Clerc qui n’avoit ni l’habit convenable à son état, ni la tonsure cléricale, il le faisoit tondre.

Vers l’an 428, Clodion introduisit dans la famille Royale seulement la coutume de porter les cheveux longs ; mais, à la réserve des Princes, tous les hommes portoient les cheveux courts, de sorte qu’ils ne leur venoient qu’au dessous des oreilles. Greg. de Tours, Hist. Fr. L. III, c. 18 ; L. VI, c. 24 ; L. VIII, ch. 10. Agathias en parle plus particulièrement dans son premier Livre. C’est la coutume des Rois des François, dit cet Auteur, de ne se faire jamais couper les cheveux. Leur chevelure, qui descend toute sur les épaules, a fort bonne grace. Les cheveux de devant se partagent sur le front, & se rejettent des deux côtés. Leurs cheveux ne sont point mal en ordre, & mal propres, comme ceux des Turcs & des Barbares, ni liés & cordelés tout ensemble sans grace & sans agrément, mais ils ont différentes manières de les tenir propres, & en ont un très-grand soin. Au reste, c’est chez eux un privilége de la famille Royale ; car leurs sujets les coupent en rond ; il ne leur est pas permis de les porter longs. Hotman traite de ce droit des Rois de France, c. 11. Franco-Galliæ. Voyez aussi les Notes de Savaron & celles du P. Sirmond sur l’épître 2 du Livre I de Sidonius Apollinaris. Couper les cheveux à un fils de Roi de