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CON

CONTINGENCE, s. f. casualité, événement incertain qui arrive par hazard. Eventus fortuitus. Ce mot n’est guère en usage que dans les phrases suivantes. Une affaire peut réussir bien ou mal, suivant la diverse contingence des choses, leur différente conjoncture. Cela n’empêche pas la contingence. Port-R. Un angle de contingence, est, en termes de Mathématique, celui que forme une ligne droite avec une ligne courbe qu’elle touche , ou celui que font deux lignes courbes qui se touchent. Contactus.

CONTINGENT, ENTE. adj. & sub. ☞ Ce qui n’est pas nécessaire, ce qui peut être ou n’être pas, ce qui peut arriver ou n’arriver pas. Voyez Nécessaire. Contingens, fortuitus. Tous les événemens humains sont contingens. On appelle, en termes de l’école, futur contingent, ce qui peut arriver ou n’arriver pas ; & proposition contingente, celle qui énonce une chose qui peut être ou n’être pas. Les Sociniens soûtiennent que Dieu ne peut prévoir les futurs contingens, parce qu’ils dépendent du mouvement de la libre volonté. Jur.

Contingent, terme de commerce & de Palais. On emploie ce terme en parlant des compagnies. Il se dit de la part & portion qu’on a dans chaque compagnie, du fonds que chaque intéressé doit fournir dans la société, de la portion que quelqu’un peut prétendre dans un partage. Portion contingente.

Contingent se dit aussi du profit qui revient à chaque intéressé par le compte de répartition, il se dit aussi de la part des frais communs d’une société.

Contingent se dit dans le même sens des dons gratuits que les Provinces ou le Clergé font au Roi. C’est la portion que chaque ville d’un pays d’états ou chaque diocèse doit payer ; en général, c’est la part que chacun doit recevoir, ou la part que chacun doit fournir. Pars illa quæ spectat aliquem, quæ ad aliquem attinet. Il a payé son contingent de cette imposition. J’ai traité de ma part contingente en cette succession, de ce qui pourra m’en revenir, pour éviter l’embarras des procès, des partages.

☞ C’est ainsi que l’on dit, que lorsque l’Empire est engagé dans une guerre qui regarde ou l’Empereur ou le Corps germanique, chaque Prince d’Allemagne doit fournir pour son contingent, tant d’hommes, d’argent & de munitions.

☞ CONTINU, UE, adj. se dit en général de tout ce qui a des parties rangées les unes auprès des autres, qui ne laissent aucun intervalle entre elles ; entre lesquelles on ne peut rien placer, qui ne sont point actuellement divisées, mais liées ensemble, & seulement divisibles, en quoi le continu diffère du contigu dont les parties se touchent à la vérité, mais sont actuellement séparées les unes des autres. Continuus.

☞ Ainsi, continu se dit du temps & des actions qui se font tout de suite, entre lesquelles il n’y a point d’intervalle, & des choses qui sont liées & unes, ou que l’on regarde comme liées & unies.

☞ Il peut y avoir de l’interruption dans ce qui est continuel ; mais ce qui est continu n’en souffre point ; de sorte que le premier de ces mots marque proprement la longueur de la durée, quoique par intervalles & à diverses reprises ; & le second marque simplement l’unité de la durée indépendamment de la longueur ou de la briéveté du temps que la chose dure. Perpetuus. Ainsi l’on dit un jeu continuel, des pluies continuelles, une fièvre continue, une basse continue, lorsqu’elle ne cesse point. Le cours des astres est un mouvement réglé & continu. Un travail continu fatigue & épuise l’esprit. Depuis que le Poëte commence à raconter son sujet, & qu’il met ses personnages sur la scène, il doit rendre son action tellement continue jusqu’à la fin, qu’on ne voie jamais ses personnages oisifs & en repos. P. le Boss.

☞ On divise la quantité en discrète & en continue.

☞ La quantité continue est l’étendue des lignes, des surfaces, des solides. C’est l’objet de la Géométrie.

☞ La quantité discrète, c’est les nombres qui sont le sujet de l’arithmétique.

Continu se dit aussi substantivement. On dit en Philosophie que le continu est divisible à l’infini. Voyez Divisibilité.

Une proportion continue, en Mathématique, est une proportion qui ne contient que trois termes, comme 2, 4, 8 ; ☞ c’est-à-dire, dans laquelle le conséquent de la première raison est l’antécédent de la seconde, comme 2, 4 :: 4, 8.

En termes de musique, on appelle basse continue ; la basse qui joue toujours, soit pendant les récits, soit pour soûtenir les chœurs.

En terme de médecine, on appelle fièvre continue, celle qui agite toujours le malade, & dont on ne connoît les accès que par les redoublemens.

Continu, en termes de Palais, se dit d’une prolongation que l’on fait à une compromission dont le temps est expiré. La compromission étoit finie ; mais nous avons fait un continu.

CONTINUATEUR. s. m. Celui qui continue un ouvrage qu’un autre a commencé. Perfector. Brovius a été le continuateur de Baronius.

☞ CONTINUATION. s. f. Continuatio. Ce mot signifie également l’action par laquelle on continue ce qui est commencé ; la durée sans interruption de la chose continuée, & la chose même que l’on continue. Ainsi l’on dit la continuation d’un ouvrage ; la continuation de la guerre, & la continuation d’une muraille, la continuation des annales de Baronius.

☞ On dit en Physique continuation du mouvement, de cette loi de la nature par laquelle un corps qui est en mouvement continue de se mouvoir dans la direction, & avec le mouvement de vîtesse qu’il a reçue, jusqu’à ce qu’une cause nouvelle l’oblige à changer d’état. Regle certaine & évidente ; parceque le corps étant indifférent, non seulement au repos ou au mouvement, mais encore à telle ou telle direction, à telle ou telle vîtesse, il doit nécessairement demeurer dans l’état où il est jusqu’à ce qu’une cause extérieure l’en fasse sortir.

Continuation & continuité considérés dans une signification synonime.

Continuation est pour la durée & continuité pour l’étendue. On dit la continuation d’un travail, d’une action ; la continuité d’un espace & d’une grandeur. La continuation d’une même conduite, d’un même édifice. Syn. Fr.

☞ Le mot de continuation désigne nécessairement le rapport d’une chose avec ce qui la précède. On donne la continuation de l’ouvrage d’un autre ; & la suite du sien ; on continue ce qui n’est pas achevé : on donne de la suite à ce qui l’est.

Continuation de communauté, n’est autre chose que la suite de communauté qui étoit entre les pere & mere avant la mort de l’un d’eux, & qui continue entre le survivant & ses enfans, faute par le survivant des pere & mere d’avoir fait inventaire après la mort du prédécédé, & de l’avoir fait clore.

☞ C’est une règle certaine que toute communauté finit par la mort d’un des associés ; mais contre le droit commun, nos coutumes ont sagement introduit la continuation de communauté, ou en ont fait une nouvelle forme, à cause de la suspicion du recélé & divertissement des effets de la communauté par le survivant. Ainsi l’on a jugé à propos, pour obliger le survivant des pere & mere, d’établir cette continuation de communauté, ou de faire faire l’inventaire requis dans ce cas pour la conservation du bien des mineurs incapables de veiller à leurs droits.

☞ CONTINUE, s. f. durée sans interrupton. Vieux mot qui n’est plus en usage que dans cette phrase adverbiale. A la continue, on travaille d’abord avec ardeur, mais on se ralentit bientôt ; & à la continue, on se lasse ; pour dire à la longue, à force de continuer. L’expression n’est pas noble.

CONTINUEL, ELLE. adj. qui dure long temps &