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ravant par l’autre. Il faut se défourner pour buter. Vous êtes fournier, il faut vous défourner. Il s’est défourné.

DÉFOYS. s. m. Vieux mot. Défense. On a dit aussi Désaise, qui a signifie encore défendu.

DÉFRAI. s. m. Payement de la dépense d’une maison, d’un équipage : Suppeditatio alineæ impensæ. Je ne voudrois pas entreprendre le défrai de cette maison, de cet équipage, pour mille francs tous les mois.

☞ Ce mot n’est plus en usage, quoiqu’on ait conservé défrayer.

DÉFRAYER, v. a. Payer la dépense de quelqu’un. Sumtus alicui suppeditare, subministrare. Le Roi défraie trois jours les Ambassadeurs étrangers dans l’Hôtel des Ambassadeurs extraordinaires. On donne tant de gages à ce Précepteur, & outre cela on le défraie de tout.

Défrayer la compagnie se dit figurément en parlant de ceux qui amusent agréablement une compagnie. Festivè delectare. On le dit aussi de ceux qui font rire la compagnie. Ridendi occasionem præbere. Et, dans un sens moins favorable, de ceux qui servent de risée. Ce mauvais Poëte a défrayé la compagnie pendant tout le repas. Dans ce sens il est du style familier.

Défrayé, ée. part.

DÉFRICHEMENT. s. m. Action de défricher : ce qu’on fait pour mettre en valeur une terre inculte. Agri novatio. Le défrichement de cette terre coûtera tant. Travailler au défrichement. Le Canada abonde en blé depuis le défrichement des terres.

Défrichement, se dit dans nos Colonies de l’endroit même que l’on défriche, ou que l’on a défriché. Ager novatus, novale. Il y avoit déjà là un beau défrichement, qu’il auroit bien augmenté.

DÉFRICHER, v. a. Mettre une terre en état d’être cultivée. Agrum ante incultum colere, rude solum arare. Dans plusieurs titres on trouve exemplare, comme si l’on disoit minus plenum reddere. Rendre un lieu, un champ, un terrein moins embarassé qu’il n’étoit, en abattant les bois, en arrachant les mauvaises herbes & les broussailles par des labours, pour le cultiver ensuite. On donne à ceux qui veulent aller faire de nouvelles habitations, autant de terres qu’ils en peuvent défricher.

Défricher, généralement parlant, signifie mettre en valeur une terre vague ou qui est en friche ; mais il signifie particulièrement, arracher les bois Deforestare, pour mettre la terre en une autre valeur, y semer du grain, planter de la vigne, &c. Duhamel.

Défricher, se dit figurément des affaires, des sciences qui sont embrouillées, & auxquelles on donne quelque éclaircissement ; que l’on débrouille & que l’on rédige en en méthode. Expedire, excutere, explicare, enucleare. Les Scaligers, les Casaubons, les Lipses, les Erasmes, sont ceux qui nous ont défriché les sciences dans le dernier siècle. Il y a des esprits d’une médiocre capacité, qui défrichent, qui préparent & qui entament les affaires. Balz. Défricher une langue, commencer à la cultiver, à la polir.

Défriché, ée. part.

DÉFRICHEUR. s. m. Qui défriche. Arator incultæ terræ. Il est juste que les défricheurs des terres en aient la propriété en recompense de leur travail.

DÉFRISER, v. a. Faire perdre la frisure à des cheveux. Crispatos capillos, calamistratam comam decutere, perturbare. Le brouillard défrise. Le grand vent, l’agitation du corps défrisent les personnes les mieux coëffees.

On dit aussi défriser ; pour dire, ôter les cheveux de dessous les papillotes. Défriser une perruque.

Défrisé, ée. part.

DÉFROC. vieux s. m. Désastre, désordre. Calamitas, malum, perturbatio.

DÉFRONCER. v. a. ôter les plis. Rugas explicare. On défronce des jupes, des hauts-de-chausses, des chemises qui ont été froncées ou plissées, en décousant ce qui entretient les plis.

On dit figurément défroncer le sourcil, pour prendre un air serein, se dérider le front, s’égayer. Frontem exhilarare. Les bons mots vinrent assez tard à la mode chez les Romains, où l’on ne défronçoit pas siaisement le sourcil. De Vign. Marv.

DÉFROQUE, s. f. Dépouille d’un Moine non reformé, d’un Chevalier qui a fait des vœux. Les biens meubles qu’un Moine ou un Bénéficier régulier laissent en mourant. Monachi vel equitis obligati votis hereditas. L’Ordre de Malte hérite, profite de la défroque des Chevaliers. La défroque des Moines appartient à l’Abbé.

Défroque, se dit aussi en un sens plus étendu, mais dans le style familier seulement, de la succession mobiliaire des autres personnes, lorsque quelqu’un en profite sans que ce soit par succession. Hereditas. Le bien de ce criminel a été confisqué, un tel courtisan a eu toute sa défroque. A la mort d’un Prince le Grand-Ecuyer a la défroque de l’écurie ; le Grand-Maître de la Garderobe celle des habits, &c. Il a vaqué plusieurs Bénéfices par la mort de cet Abbé, c’est un tel qui a eu toute sa défroque.

DÉFROQUER. v. a. Oter le froc ; quand on y joint le pronom personnel, il signifie, quitter le froc, l’état monacal, pour passer dans un autre état. Religosum alicui amictum detrahere, eripere ; aliquem religioso habitu exuere, spoliare. Un Moine se défroque, lorsqu’il obtient dispense de ses vœux, qu’il les fait déclarer nuls, quand il est fait Evêque, ou Cardinal. Quand on se défroque par libertinage, on est apostat.

☞ On dit populairement de ceux qui gagnent tout l’argent de quelqu’un au jeu, qu’ils l’ont défroqué. Exspoliare.

Défroqué, ée. part.

DÉFRUCTU. s. m. Terme tiré du Latin, dont on s’est servi en François, pour signifier le fruit, la menue dépense que fait celui qui prête sa table à ceux qui font des parties pour quelques repas où chacun apporte son plat ; comme bois, chandelle, linge, salades, desserts, &c. Il coûte souvent d’avantage à celui qui est obligé à payer le defructu, qu’à tous les autres. Voyez la Dissertation d’un Chanoine d’Auxerre sur l’origine de ce mot dans le Mercure de 1726. Celui à qui l’on annonçoit l’Antienne De fructu ventris tui, pendant l’Octave de Noël, étoit obligé de payer le souper.

DÉFRUIT. s. m. Provision, chose destinée à quelque usage. Il a acheté plusieurs arpens de bois, dont il vendra la meilleure partie ; & le reste sera pour son défruit. C’est un mot de Province.

DÉFRUITER. On a dit des arbres dans le vieux langage, se défruiter, pour dire, se dépouiller de ses fruits.

DEFTARDAR ou DEFTERDAR. s. m. Trésorier des Finances dans l’Empire Turc. Quæstor, Meninski l’appelle supremus Thesaurarius, Præses Cameræ, & après Castel, Qui libris accepti & expensi præest, ejusmodi codicum custos & minister ; Quæstor, Grand Trésorier, Camerlingue, Intendant des Finances ; c’est-à-dire, que la charge de Deftardar répond à celle-ci. Le Deftardar est celui qui tient les rôles, & les états de la milice & des finances chez les Persans & chez les Turcs ; c’est une des plus grandes charges de l’Etat, & qui a du rapport à celle de Surintendant ou Contrôleur Général des Finances en France. D’Herb. C’est le Deftardar qui reçoit les revenus du Grand-Seigneur, qui paie les troupes, & qui fournit toute la dépense nécessaire pour les affaires publiques, & par là cette charge est différente de celle du Chaznadar, dont nous avons parlé en sa place, & qui est Trésorier du Serail, de la maison du Prince ; au lieu que le Deftardar est Trésorier de l’Etat. Il y a un Deftardar dans chaque Beglierbeglic ou Gouvernement, & il est un des