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font quand ils parlent aux chiens pour les flatter, ou les animer à poursuivre la bête. Clamor. Comme hourvati, est un cri pour faire retourner les chiens, quand ils sont hors des voies ; geld, hela, cri pour les faire requêter quand ils sont en défaut ; hari, hari, pour les faire craindre quand ils branlent du change. Harlou est le cri qu’on fait à la vue du loup ; & hou, hou, quand on le poursuit. Velleau, est le cri qu’on fait aux chiens courans, à la vue du renard ou du lievre ; tayau, quand on lance le cerf, &c.

Cri ou Cri d’armes, en terme de Blason, est un certain mot qui sert de devise, & qu’on met au cimier des armes : ce qui vient d’un certain cri, ou signal que les chefs de maisons, ou les soldats crioient à la guerre. Alalagmus gentilitius. Autrefois nul n’étoit reconnu pour Gentilhomme de nom, d’Armes & de cri, que celui qui avoit droit de lever banniere ; l’un & l’autre servant à mener des gens à la guerre, à les rallier, & à les assembler près du drapeau. Il y avoit quatre sortes de cris. Le premier pour se rallier pendant ou après le combat : le second étoit un cri d’heureux présage ou d’invocation, comme celui de Clovis, qui voyoit balancer la victoire à la bataille de Tolbiac, Montjoie S. Denis. Le troisieme étoit un défi qui tenoit de la rodomontade ; & le quatrieme servoit à se reconnoître, & à se distinguer des ennemis. Le P. Anselme. L’ancien cri des Rois de France étoit Montjoie S. Denis. Il y avoit aussi des cris de défi, d’invocation, d’exhortation, de résolution, d’événement, de commandement, &c. les cris servoient aussi aux Hérauts dans les tournois, pour appeler les Chevaliers, parce que le cri de plusieurs étoit celui de leurs noms, de leurs maisons & de leurs villes. On dit en proverbe des Maisons d’Ally, Mailly & Crequy, Tel nom, telles Armes, & tel cri. Dans les tournois, chaque Chevalier avoit son cri, mais dans les occasions de guerre, il n’y avoit que les Chefs qui en pouvoient avoir. Le cri servoit à se rallier : à présent le cri de guerre n’est plus que le mot du guet. M. Du Cange a fait une dissertation curieuse du cri d’Armes.

On dit proverbialement qu’il n’y a qu’un cri après une personne ; pour dire qu’on la souhaite, qu’on l’attend avec empressement. On dit aussi qu’il n’y a qu’un cri sur quelque chose, sur une personne, pour dire que chacun en parle de même manière. On dit : chasser à cor & à cri ; pour dire, chasser avec le cor & les chiens. On dit figurément, chercher quelqu’un à cor & à cri, pour dire, le chercher, en demandant par-tout de ses nouvelles.

CRIAGE. s. m. Præco. Crieur public, Officier de la ville de Paris, qui après le son de la trompette ou du tambour, proclame, annonce, déclare quelque chose au public. Ce mot n’est plus en usage. Voyez de Lauriere sur Ragueau.

☞ CRIAILLER. v. n. Crier souvent, faire du bruit à plusieurs reprises & sans sujet. Clamitare. Les femmes sont sujettes à criailler. Elle criaille tantôt après son mari, tantôt après son enfant, tantôt après sa servante.

☞ CRIAILLERIE. s. m. Bruit qu’on fait en criant à différentes reprises, soit en contestant, soit en se plaignant, soit en réprimandant. Clamitatio, clamor importunus, queritatio. Un homme est souvent obligé d’éviter la maison à cause des criailleries de sa femme. Socrate ne se soucioit pas des criailleries de sa femme Xantipe. Ablanc. Les criailleries du Barreau. Id.

CRIAILLEUR, euse. s. Qui criaille, qui fait du bruit. Clamator, clamosus. il n’y a point de plaisir à disputer avec des criailleurs. Il faut ces menus créanciers qui sont des criailleurs. Ces trois mots sont du discours familier.

☞ CRIANT, ANTE. adj. qui fait crier, qui excite à se plaindre hautement. Une injustice criante.

On fait usage de ce mot en parlant d’une cataracte ou membrane dure & qui fait du bruit touchée de l’aiguille de l’Opérateur. Sonans, resonans. En réitérant cette opération de la cataracte sur l’œil droit, après avoir plongé l’aiguille à l’ordinaire, l’Opérateur sentit sous son aiguille une membrane dure & criante, qui résistoit à l’aiguille. Pinson.

☞ CRIARD, ARDE. adj. Qui est sujet à crier, qui se plaint ou gronde souvent & sans sujet. Clamosus, oblatrator. C’est un terme familier. On le dit particulièrement des enfans. Les enfans sont criards. Femme criarde. Les plus grands criards ont le plus d’avantage dans leurs assemblées. Abl.

☞ On appelle oiseaux criards ceux qui crient beaucoup, comme le geay, la corneille, &c.

On appelle dettes criardes, les petites sommes qu’on doit aux Marchands & Artisans pour de menues fournitures de bouche & autres choses ; celles des créanciers qui font du bruit, & viennent importuner leurs débiteurs à force de cris & de plaintes. Clamosa debita. Les plus méchans payeurs ont soin d’acquitter les dettes criardes.

Mémoire juste & bref de nos dettes criardes. Regn.

On dit en Fauconnerie, quand l’oiseau mord, & qu’il est criard, il lui faut mettre un chaperon à bec couvert comme un étui.

CRIARDES. adj. f. pl. On appelle ainsi des toiles extrêmement gommées, dont les femmes font des espèces de jupons, pour soutenir & comme enfler leur jupes de dessous. Ce nom leur vient d’un bruit que ces toiles font, lorsque celles qui en portent, sont obligées de faire quelque mouvement.

CRIBLE. s. m. Instrument à vanner, à nettoyer le grain, le blé, l’avoine. Instrument fait pour l’ordinaire d’une peau tendue au dedans d’un cercle, & percée de plusieurs petits trous, pour séparer le bon grain d’avec le mauvais, & d’avec les ordures. Cribrum, capisterium, incerniculum. Il y a des cribles à pied dans les greniers qui sont composés d’une grande auge élevée, où l’on verse le grain, qui en coulant sur des petites planchettes de bois, & sur plusieurs rangs de fil d’archal, s’évente & se nettoie, tandis que la poudre & les ordures coulent le long d’une peau qui est au derrière.

Isidore dit que cribrum a été appelé de ce nom, quòd ibi currat frumentum.

Il y a un crible de main dont on se sert dans les écuries pour nettoyer l’avoine chaque fois qu’on la donne aux chevaux. Il est composé d’un grand cercle de bois large de trois doigts, & d’une peau de parchemin entièrement percée par des trous de différentes figures. Il y a aussi des cribles qu’on suspend au plancher avec des cordes, afin de pouvoir s’en servir avec moins de fatigue.

☞ CRIBLE, dans l’économie animale, & en matières de Physique, se dit d’un plan percé de petits trous, qui, en refusant passage à certaines parties grossières, en séparent les plus fines, & les admettent. Les Cartésiens se servent de la comparaison du crible pour expliquer comment les sucs de la terre font différens fruits, quand ils montent dans les arbres ; en supposant que les arbres sont percés, comme les cribles, de différente espèce de trous, qui n’admettent que les atomes des figures qui leur ressemblent.

Crible, en termes de Pharmacie, est un instrument dont on se sert, après avoir pilé quelque drogue dans un mortier, pour séparer ce qui est délié d’avec ce qui est grossier. On pile de nouveau ce qui n’a pu passer & on le remet dans le crible. Comme il faut que les poudres soient plus ou moins subtiles, il a fallu aussi inventer plusieurs sortes de cribles. Il y en a qui sont faits avec des écorces de tillet coupé, déliées également, lesquelles on entrelace en façon de treillis. On en fait d’autres avec un tissu de crin de cheval, ou de soie, tendu d’un côté & d’autre avec deux cercles de bois.

Crible des Coquilles. De leur variété peut dépendre celle des coquilles.