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DEP

qu’on avoit mise, & qu’il s’y trouve quelque déchet, on dit qu’il y a déperdition. Voy. Déchet.

DÉPÉRIR. v. n. S’altérer, se ruiner ; diminuer de valeur & de qualité. Deteriorem fieri. Les provisions qu’on garde dépérissent tous les jours, & se corrompent. Un bâtiment qui n’est point entretenu dépérit bien-tôt. Les chevaux entre les mains d’un mauvais cocher dépérissent, deviennent maigres. Un enfant en chartre dépérit à vue d’œil. La beauté dépérit. Laisser dépérir l’armée. Abl. L’armée dépérit tous les jours. Voit. Elle est dépérie, elle a dépéri.

☞ En matière criminelle, on dit que les preuves dépérissent par la longueur du temps, pour dire qu’elles deviennent plus foibles ou plus difficiles par la mort des témoins.

☞ On dit aussi, que des dettes dépérissent, pour dire que le recouvrement en devient plus difficile.

Dépéri, ie. part. Deterior factus.

DÉPÉRISSEMENT. s. m. État de décadence, altération d’une chose qui diminue. Imminutio. La plupart des choses sont sujettes au dépérissement. Celui qui est cause du dépérissement de quelque chose, est condamné aux dommages & intérêts. Il ordonne, pour éviter ce dépérissement, que l’aîné aura seul ma maison. Patru.

☞ DÉPÊTRER, v. a. Dégager, débarrasser. Expedire. Il ne se dit au propre que des pieds, quand ils sont embarrassés. Dépêtrer, ou démêler un cheval, lui remettre les jambes où elles doivent être, quand il vient à les passer par-dessus ses traits, quand il s’est engagé dans ses traits. Il s’étoit engagé dans ce marais mais il s’en est dépêtré. Expedire se.

☞ Il se dit plus ordinairement au figuré, pour tirer d’embarras, mais dans le style familier seulement. Il a eu bien de la peine à se dépêtrer de cette mauvaise affaire, de cet importun. La pauvreté est si gluante qu’on ne sauroit s’en dépêtrer. Abl. Nous faisons tout ce que nous pouvons pour le dépêtrer d’un engagement si mauvais pour lui. Mad. de Sév.

Dépêtré, ée. part. Cheval dépêtré. Expeditus, explicatus.

DÉPEUPLEMENT. s. m. Action par laquelle on dépeuple. Depopulatio. Le dépeuplement de la Grèce & de l’Asie est venu du gouvernement violent des Turcs. Les guerres continuelles ont causé le dépeuplement de nos Provinces. On dit aussi le dépeuplement d’une forêt, quand on y a fait de grandes dégradations, qu’on y a abattu quantité d’arbres.

DÉPEUPLER, v. a. Diminuer le nombre des habitans d’un pays, d’une ville. Urbem civibus orbare. Les guerres d’Orient ont dépeuplé la Grèce & l’Asie. La peste a dépeuplé cette ville, l’a presque rendue déserte. Le joug de la tyrannie, les courses des Barbares dépeuplent les pays.

☞ On dit, dans le même Cens, dépeupler un étang, une rivière, les dégarnir de la plus grande partie du poisson.

☞ On dit de même que les braconniers dépeuplent une terre, un pays de gibier. Dépeupler une garenne de lapins, un colombier de pigeons. Vacuare.

Dépeupler, se dit aussi, en termes d’Eaux & forêts & de Jardinage. Dépeupler une forêt, une pépinière, c’est en tirer beaucoup d’arbres ou de plan.

☞ On le dit aussi de plusieurs autres choses dont on diminue le nombre.

Elle dépeuple de bijoux
Les boutiques du Pont au Change. Bens.

Dépeuplé, ée. part. Depopulatus.

DÉPHLEGMATION. s. f. Voy. DÉFLEGMATION.

DÉPHLEGMÉ. Voyez DÉFLEGMÉ.

DÉPHLEGMER. Voyez DÉFLEGMER.

DÉPIÉ. s. m. Terme de Coutumes & de Jurisprudence féodale. Dépié de fief, signifie démembrement de fief. Distractio, distractio feudi. Voyez Démembrement de fief.

DÉPIÉCER. Terme de Coutumes & de Jurisprudence féodale. Dépiécer un fief, signifie, démembrer un fief, le mettre en pièces. Feudum distrahere, partiri dividere. Voyez Démembrer.

DÉPILATIF, ive. adj. Terme de Médecine. Ce qui fait tomber le poil, les cheveux, étant appliqué dessus. J’ordonnai le liniment dépilatif suivant. Degori.

DÉPILATION. s. f. Action de dépiler, de faire tomber le poil avec des dépilatoires. Les Anciens se servoient de résine pour dépiler,

Nullus totâ nitor in cute, qualem
Bruttia præstabat calidi tibi fascia visci,


dit Juvénal, v. 13. & 14. de la 9e. Satyre (Ce que Martignac a ainsi traduit : vous ne prenez aucun soin d’avoir la peau nette par tout le corps, comme lorsque vous usiez d’un dépilatoire de poix chaude du pays des Brutiens ; & à cette occasion il remarque que la poix que l’on étendoit toute chaude sur du linge, ou sur du cuir, étoit un dépilatoire merveilleux.) La dépilation faisoit paroître frais & dodu. M. le Duchat, note sur Rabelais.

☞ Ces médicamens qui ne font qu’arracher le poil par leur qualité agglutinative ne sont pas, à proprement parler, des dépilatoires. Ils procurent, mais n’opèrent pas la dépilation. On ne doit appeler dépilatoires que les remèdes qui agissent sur le poil, & le détruisent.

DÉPILATOIRE. s. m. Emplâtre ou drogue qu’on applique sur le poil pour le faire tomber. Dropax. Il est principalement composé d’orpiment, & est fort caustique, même dangereux. Pour des cheveux crûs sur le front d’une fille je prescrivis un dropax ou dépilatoire de cette sorte. Dégori.

DÉPILER. v. a. Terme de Médecine. Faire tomber le poil avec des dépilatoires. Pilos detrahere, avellere, depilare. Les gens propres veut chez les Baigneurs pour se faire dépiler. On ne le dit pas de ceux à qui les cheveux tombent naturellement. Dégori dans son Trésor de la pratique de Médecine, donne plusieurs remèdes pour se dépiler.

Ce mot vient de pilus, poil, & de la particule de qui marque l’action par laquelle on ôte quelque chose, on détruit, on défait une chose.

DÉPIQUER. v. a. Faire que quelqu’un ne soit plus piqué, lui ôter le chagrin qu’il a de quelque chose. Lenire, mitigare. Si j’ai été assez heureux pour trouver quelque place dans votre amitié, ce gain là me dépique de toutes mes pertes. Voit. On s’en sert quelquefois dans la conversation.

Puisque ce mot sert à enrichir notre Langue, & qu’on dit se piquer & être piqué de quelque chose dans un sens opposé, je suis d’avis que nous disions aussi se dépiquer, à condition toutefois qu’on n’imitera pas la mauvaise affectation de certains jeunes gens qui le disent si souvent que cela seroit capable d’en dégoûter ; car les meilleures choses rebutent quand on en use avec excès. Mots à la mode.

DÉPISTER. v. a. Rechercher comme à la piste, découvrir des choses inconnues par d’autres connues. On y dépiste les premières traces du territoite Liégeois, de son étendue, de ses bornes, &c. Journ. de Trév. Août 1737. Ce terme est forgé pour marquer l’attention d’un Auteur à faire des recherches sur des Antiquités, comme d’un homme qui suit à la piste les choses qu’il cherche.

☞ DÉPIT. s. m. Chagrin mêlé d’un peu de colère ; agitation impatiente contre quelqu’un qui nous obstine ou nous mécontente. Stomachus. Concevoir un dépit, du dépit. Faire une chose par dépit, de dépit. Le moment du dépit est l’heure du berger. S. Evr. Je rends justice à ses bonnes qualités ; mais c’est avec une espèce de dépit. S. Evr. Ne fût-on pas né Poëte, le dépit tient quelque lieu de génie. Bouh. C’est la pensée de Juvénal, Sat. I. v. 79

Si natura negat, facit indignatio versum.