Page:Dictionnaire de Trévoux, 1771, III.djvu/557

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
549
ECL

grande partie de cette même surface. Ainsi il n’y aura que ceux qui habitent cette partie de la terre qui se trouveront dans les ténèbres ; ensorte que, la lune venant à jeter son ombre dans une fort petite étendue, on y verra disparoître le soleil. C’est la raison pourquoi on nomme ce phénomène éclipse de soleil : quoique improprement, puisque le soleil ne manque point pour cela de lumière. En effet il la conserve toujours avec le même éclat : ce sont au contraire les régions de la terre où l’ombre vient à se répandre, qui en manquent effectivement, & ce sont elles qui sont véritablement éclipsées. Institut. Astronom. p. 198. L’éclipse de lune se fait, lorsqu’elle est pleine, & opposée au soleil dans les mêmes nœuds, & que l’ombre de la terre tombe sur le disque de la lune, & empêche qu’elle ne reçoive sa lumière. Ce qui fait qu’il n’arrive pas des éclipses toutes les fois que la lune est entre le soleil & la terre, ou la terre entre le soleil & la lune, c’est que souvent ces trois corps ne sont pas exactement rangés en droite ligne, & que par conséquent celui qui devroit faire l’éclipse jette son ombre un peu à côté de celui qui en devroit être couvert. Font. Chaque pleine lune nous donneroit une éclipse, si cette planète avoit un mouvement périodique dans l’Ecliptique ; mais l’orbite de la lune forme avec l’Ecliptique un angle qui va quelquefois jusqu’à 5 degrés 17 minutes. C’est pourquoi la lune ne s’éclipse que lorsqu’elle se trouve dans un des nœuds, ou près d’un des nœuds, dans le même temps que le soleil paroît dans le nœud, ou près du nœud opposé. Les Satellites de Jupiter ont aussi leurs éclipses, quand cette planète se trouve entre le soleil & ses satellites.

Les Anciens se formoient une idée affreuse des éclipses, comme de présages des plus funestes afflictions. Bay. Plutarque rapporte qu’à Rome on n’osoit s’expliquer qu’en secret de la cause naturelle des éclipses, parce que c’étoit ôter aux Devins leur emploi. Les hommes ont fait, débité bien des sottises sur les éclipses. Font. L’éclipse de soleil dure moins que celle de la lune. La plus longue éclipse du soleil n’est que de deux heures. La raison est, que le mouvement propre de la lune se faisant d’Occident en Orient, elle achève son cours, ou mois périodique, en 27 jours & demi, & quelque chose de plus, c’est-à-dire, qu’elle fait à-peu près les 360 degrés en ce temps-là : ainsi il faut qu’elle parcoure 13 degrés en un jour ; & par conséquent elle fait un demi-degré à chaque heure, & ce demi-degré est environ la grandeur du diamètre apparent du soleil : ainsi, même lorsque l’éclipse du soleil est la plus longue, c’est-à-dire, lorsqu’elle est totale, la lune pour le couvrir emploie une heure, qui est la moitié de la durée d’une éclipse ; &, pour se retirer de devant le disque du soleil, il lui faut de même une heure entière. Pour déterminer la durée d’une éclipse de soleil, ou de lune, on divise ordinairement le diamètre du soleil ou de la lune en douze parties égales, qu’on appelle doigts écliptiques, & chaque doigt en 60 minutes. On appelle demeure, le temps que tout le disque du soleil demeure caché à nos yeux par l’interposition de la lune ; ou le temps que route la lune demeure enveloppée dans l’ombre de la terre. On appelle incidence, ou immersion, le commencement d’une éclipse de lune, ou de soleil : c’est-à-dire, le moment auquel la lune commence à nous cacher une partie du soleil, ou auquel la lune commence à être obscurcie, & à entrer dans l’ombre de la terre ; émersion ou expurgation, quand le soleil recommence à paroître, ou que la lune sort de l’ombre de la terre.

Les Astronomes divisent l’éclipse de lune en partiale, quand la lune n’est obscurcie qu’en partie, en totale sans demeure, quand la lune est entièrement obscurcie, & qu’elle ne demeure pas un temps considérable dans l’ombre ; & totale avec demeure, quand tout le corps de la lune est obscurci, & qu’il demeure quelque temps dans l’ombre. On appelle encore éclipse centrale, une éclipse totale, en sorte que l’axe de l’ombre, ou du cône que fait l’ombre de la terre, passe par la centre de la lune. Pour le soleil, il peut y avoir une éclipse centrale, qui ne soit point totale, lorsque dans le temps de l’éclipse la lune se trouve dans son apogée, & plus éloignée de la terre. Car pour lors, si le centre de la lune se trouve à notre égard dans la même ligne que le centre du soleil, l’éclipse sera centrale ; mais, parce que la lune sera plus près du soleil, & que d’ailleurs son disque est beaucoup plus petit que celui du soleil, elle nous en cachera une bien moindre partie, & il se pourra faire qu’à l’entour de la partie du disque du soleil, qui sera éclipsée, il reste comme un anneau de lumière, que la lune ne couvrira point : c’est pour cela que ces sortes d’éclipses s’appellent annulaires. Les éclipses annulaires sont fort rares : généralement parlant il arrive plus d’éclipses de soleil que d’éclipses de lune. Mais, dans chaque pays en particulier, on voit plus d’éclipses de lune que d’éclipses de soleil. La raison de cela, c’est que l’éclipse de la lune paroît toujours sur tout l’hémisphère de la terre sur lequel la lune est pendant l’éclipse, au lieu que l’éclipse de soleil ne paroît que dans les endroits de la terre à l’égard desquels la lune cache le soleil. La lune ne peut guère éviter l’éclipse de cinq en cinq mois. L’éclipse du soleil est souvent précédée quinze jours devant, & suivie quinze jours après d’une éclipse de lune.

☞ La lune totalement éclipsée paroît quelquefois de couleur de cendre, quelquefois d’une autre couleur.

☞ L’ombre parfaite de la terre ne s’étend pas jusqu’à quarante-huit mille lieues. L’ombre imparfaite, ou la pénombre s’étend jusqu’à environ trois cens vingt cinq mille lieues au-delà de la terre. Ce n’est pas dans l’ombre, mais dans le pénombre que se fait l’immersion du disque de la lune. Cette pénombre contient plusieurs rayons du soleil. Ainsi la lune, quoique totalement éclipsée, doit nous paroître tantôt rougeâtre, tantôt d’une autre couleur.

☞ La lune se meut périodiquement d’Occident en Orient ; ainsi c’est toujours le limbe oriental du disque de cette planète qui doit entrer le premier dans l’ombre de la terre.

☞ Dans les éclipses de lune, le soleil & la lune sont séparés l’un de l’autre de six lignes célestes : ainsi il n’est pas possible que ces deux astres se trouvent ensemble sur l’horison. Lorsque cela paroît arriver, c’est une illusion purement optique, causée par la réfraction de la lumière. C’est par cette raison que nous croyons voir le soleil sur l’horison, lorsqu’il n’y est pas réellement. Voyez Réfraction.

La figure d’une éclipse est la représentation sur un plan, du commencement, du milieu, & de la fin de cette éclipse, soit de lune, soit de soleil. On appelle éclipse moyenne, celle qui se fait dans la moyenne conjonction, ou dans la moyenne opposition ; & éclipse vraie, celle qui se fait dans la vraie conjonction, ou dans la vraie opposition.

Il y a une éclipse des Satellites de Jupiter presque tous les jours. On ne sait point certainement les longitudes que par le moyen des éclipses. Les éclipses du premier Satellite de Jupiter sont pour cela bien plus commodes & bien plus sûres que celles du soleil ou de la lune, & outre cela bien plus fréquentes. L’illustre M. Cassini a fait des tables de mouvemens du premier Satellite de Jupiter : ces tables servent à calculer les éclipses de ce Satellite, & le temps de ses immersions & émersions. L’usage en est très-aisé pour la détermination des différences en longitude. Deux personnes observent chacun en différens lieux une même immersion ou émersion, & après comparent le temps de leurs deux observations, pour avoir la différence de l’heure, minute & seconde de chacune, laquelle différence étant convertie en degrés & minutes, comptant quinze degrés pour une heu-