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Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome I.djvu/148

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ADAD — ADADREMMON

quêtes ; mais il ne fit de mal sérieux au roi d’Israël que dans les dernières années de ce prince. Jusque-là il avait probablement vécu comme un chef de tribu nomade. »

Tout en créant de sérieuses difficultés à Salomon à la fin de son règne, Adad ne paraît pas même alors s’être emparé de toute l’Idumée, puisque le monarque Israélite pouvait, sans être inquiété, équiper une flotte dans son port d’Asiongaber, à l’extrémité sud de l’Idumée. III Reg., ix, 26. Il fallait, pour faire le commerce avec Ophir, que Salomon fût maître de la partie occidentale de ce pays. La route de Palestine à Asiongaber, qui côtoie cette partie, du nord au sud, devait donc être restée libre et sûre. D’un autre côté, le royaume que se fit Adad ne dut pas être longtemps indépendant : nous voyons, en effet, que du temps de Josaphat il n’y avait pas de roi en Idumée. III Reg., xxii, 48. Sous Joram, l’Idumée, conquise par David, s’affranchit du joug de Juda et se donna un roi. IV Reg., viii, 20-22 ; II Par., xxi, 8. Voir Idumée.

4. ADAD, dieu syrien. Voir Hadad 2.


ADADA (hébreu : ’Ad’âdàh ; Septante : Ἀρουήλ), ville située sur la frontière méridionale de Juda, et mentionnée une seule fois dans la sainte Écriture, Jos., xv, 22, où elle est citée entre Dimona et Cadès. Il n’en est pas question dans l’Onomasticon d’Eusèbe, mais on l’a retrouvée de nos jours dans les ruines qui ont conservé exactement le même nom, ’Ad’adah, à l’est de Bersabée, entre cette ville et la mer Morte. G. Armstrong, Ch. W. Wilson et Conder, Names and places in the Old and New Testament, 1889, p. 4.


ADADREMMON (hébreu : Hǎdadrimmôn), ville de la plaine d’Esdrelon, mentionnée une seule fois, dans ce texte du prophète Zacharie : « En ce jour, il y aura un grand deuil dans Jérusalem, tel que fut celui d’Adadremmon dans la plaine de Mageddon. » xii, 11. Les versions et les commentateurs ont donné à ce verset différentes interprétations, qu’il faut examiner avant d’arriver au véritable sens.

Les Septante ont ainsi rendu la dernière partie du texte : ὡς κοπετὸς ῥοῶνος ἐν πεδίῳ ἐκκοπτομένου « comme le deuil du grenadier coupé dans la plaine. » Il n’est pas nécessaire de chercher ici, avec saint Cyrille d’Alexandrie, une allusion au désespoir de l’agriculteur qui voit couper cet arbre, dont il admire la beauté et apprécie l’utilité, Comment. in Zach., t. lxxii, col. 226 ; iii, avec Théodoret, une allusion au bruit des bûcherons qui l’abattent, Explan. in Zach., t. lxxxi, col. 1946 : la méprise des traducteurs grecs est évidente. Ils ont pris des noms propres pour des noms communs : ainsi ils rattachent hadad à la racine arabe hadda, « émettre un son grave, » dont le sens est parfois appliqué au mugissement des vagues se brisant sur le rivage, cf. Gesenius, Thesaurus linguæ heb., p. 365 ; J. F. Schleusner, Lexicon græcum Vet. Test., Londres, 1829, t. iii, p. 14 ; puis ils font de rimmôn le nom d’un fruit bien connu, « la grenade, » ou de l’arbre qui le produit, et enfin de megiddôn, le participe passé de gâdad, « couper. »

La paraphrase chaldaïque voit ici un double deuil : 1° « celui de la mort d’Achab, fils d’Amri, tué par Hadadrimmon, fils de Tabrimmon, » à Ramoth-Galaad, III Reg., xv, 18, et xxii, 29-38 ; 2° « celui de la mort de Josias, fils d’Amon, que Pharaon le Boiteux (Néchao) tua dans la plaine de Mageddo. » IV Reg., xxiii, 29. La première application est fausse : l’auteur fait, sans preuve, de Hâdadrimmôn le même personnage que Benhadad, roi de Syrie. L’identification fût-elle vraie, ajouterons-nous avec Rosenmüller, que la grammaire et l’histoire nous interdiraient ce sens ; en effet, au lieu de « deuil d’Adadremmon », il eût fallu dire « deuil d’Achab », puisque la plainte avait nécessairement pour objet le roi d’Israël, et non son meurtrier ; et puis on n’a jamais entendu parler d’un deuil public qui ait accompagné la fin de ce roi tristement célèbre par son impiété. Scholia in Vet. Test., Leipzig, 1828, viie partie, t. iv, p. 343. La seconde explication est, comme nous le verrons, la seule vraie ; aussi la version syriaque explique-t-elle bien la pensée en remplaçant Hadadrimmon par « fils d’Amon ».

Enfin, les massorètes eux-mêmes semblent n’avoir pas compris la signification du mot qui nous occupe, et leur ponctuation repose uniquement sur le sens vulgaire de rimmôn, « grenade ; » mais ce fruit n’a aucun rapport avec la divinité dont nous parlerons tout à l’heure.

Parmi les commentateurs, Hitzig voulut d’abord reconnaître dans le deuil d’Adadremmon celui qu’aurait occasionné la mort d’Ochozias, tué par Jéhu IV Reg., ix, 27. Mais la fin de ce roi ne fut jamais, pas plus que celle d’Achab, un deuil national pour les Hébreux. Abandonnant du reste cette hypothèse, Hitzig en inventa plus tard une autre, que nous pouvons encore moins accepter, et qui a cependant rencontré un certain nombre d’adhérents : Movers, Merx, Wellhausen et Reuss. Voici comment ce dernier l’expose : « Selon toute probabilité, Hadadrimmon est le nom d’une divinité adorée par les païens du nord de la Palestine et dans la Syrie (IV Reg., v, 18, et les nombreux noms propres composés avec Hadad), et plus particulièrement celle du soleil printanier, dont tout le monde connaît le mythe tel qu’il a été poétiquement transformé par les Grecs (Adonis). La mort du dieu (dans le sens symbolique et astronomique) était célébrée dans tout l’Orient par une grande fête funèbre, qui a fourni le cadre d’une jolie pièce de Théocrite, Idylle 13, et d’une belle élégie de Bion. Ce nous semble chose assez naturelle que le prophète prédise ici aux Israélites sauvés et repentants un deuil tout aussi grand que celui de la fête funèbre du paganisme, à laquelle ils ont sans doute pris part dans leurs égarements polythéistes, comme cela nous est d’ailleurs explicitement attesté par Ézéchiel, viii, 14. » La Bible, Ancien Testament, IIe partie, Les Prophètes, Paris, 1876, t. i, p. 355.

Ce rapprochement avec la vision d’Ézéchiel semblait donner un certain appui à l’hypothèse ; elle a cependant été avec raison rejetée par Ewald, et surtout par Wolf Baudissin, qui l’a complètement détruite. Real-Encyklopädie für prot. Theol., 2e édit., t. v, p. 493 ; Studien zur semit. Religionsgeschichte, 1876, 1. 1, p. 295 et suiv. Il est vrai que Thammuz ou Adonis avait un culte célèbre en Phénicie et en Syrie : une rivière portait son nom (aujourd’hui le Nahr-Ibrahim, un peu au-dessous de Byblos).Voir Thammuz. Mais est-il donc croyable que le prophète Zacharie ait assimilé la pénitence d’Israël aux lamentations d’un culte idolâtrique et souvent obscène ? Non, personne n’admettra que l’homme de Dieu ait osé comparer la chose la plus sainte, la douleur et la mort du Christ, à ces rites voluptueux auxquels se livraient les femmes phéniciennes dans les fêtes du dieu Soleil. Le nom même d’Adadremmon s’oppose à cette opinion, car il ne convient pas et n’a jamais été donné à Adonis.

Ce nom, qui a reçu des monuments assyriens son explication définitive, se compose de deux mots, dont Schrader expose ainsi le sens : « On savait déjà par les écrivains classiques que Hadad était, chez les Syriens, le dieu du ciel et du soleil. Macrobe, Sat. i, 23. Or les monuments nous montrent que ce dieu Dad, c’est-à-dire Hadad, est identique à l’assyrien Rammânu, Râmânu, le dieu du tonnerre et de la tempête (racine ra’am, ra’amân, « le tonnant, » ʿaîn compensé par le redoublement du mem). Le même idéogramme (AN) IM sert également pour les deux noms ; en sorte que le composé Hadad-Rammân indique que le dieu du ciel Hadad est ici regardé surtout comme le « dieu de la tempête », rappelant ainsi le Ζεῦς βροντήσιος, Ζεῦς βροντῶν, ou le « Jupiter « tonans ». Die Keilinschriften und das alte Test., 2e édit., Giessen, 1883, p. 454. M. de Vogué, dans la Revue archéologique, juin 1868, t. xvii, pl. xv, n° 28, et fig. 24, p. 440,