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Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome I.djvu/473

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AR, AR-MOAB

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Jin, 1854, t. i, p. 411 ; Robinson, Biblical Researches in Palestine, Londres, 1856, t. ii, p. 166 ; Van de Velde, Memoir to accompany the Map of the Holy Land, 1859, p. 287 ; G. Armstrong, W. Wilson et Conder, Names and places in the Old and New Testament, Londres, 1889, p. 12, etc. Suivant Aboulféda, Géographie, texte arabe publié par MM. Reinaud et le baron Mac Guckin de Slane, Paris, 1840, p. 247, Er-Rabbah a succédé à « une ville capitale très ancienne », qu’il nomme Mâb, et dont « la mention est célèbre dans l’histoire des Israélites ». Mâb rappelle évidemment l’hébreu 3nid et la Mraiê de YOnornasticon, p. 276, « ville de l’Arabie, qui est maintenant Aréopolis ; le pays s’appelle aussi Moab, mais la ville a comme nom propre Rabbalh-Moab. »

Plusieurs exégètes cependant n’admettent pas l’identité d’Ar ou Aréopolis et d’Er-Rabbah. Dietrich l’a combattue dans Merx, Archiv fur ivissenschaftliche Erforschung des A. T., ., p. 320 et suiv. Ses arguments sont ainsi résumés par Franz Delitzsch, Riblischer Commentai- ûber das Alte Testament, das Ruch Jesaia, Leipzig, 1889, p. 220 : « 1° L’Ancien Testament et les versions ne connaissent aucune Rabbah moabite ; c’est Eusèbe qui la mentionne le premier, et elle semble, après la ruine d’Ar par le tremblement de terre dont parle saint Jérôme, être devenue la capitale du pays et avoir reçu, avec le nom de Rabbath Moab, celui d' 'Apsôito^i ; . — 2° Ar était située sur les bords de l’Arnon, tandis que les ruines de Rabbah se trouvent à six heures au sud du torrent, non pas à la frontière nord, mais au milieu même de Moab. Le récit de Num., xxi, 28, rend vraisemblable la position d’Ar au confluent du Ledjoum et du Modjib, peutêtre (au moins les fortifications placées « sur les hauteurs de l’Arnon » ) aux ruines actuelles d’Oumm er-Reçâs, au sud-est (?) du même confluent. »

Il est vrai que l’Ancien Testament et les versions ne parlent

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199. — Monnaie d’Ar -Moab.

Tête laurée de Septime-Sévère. A2 SEOTHPÛ.- i^.PABBA© MQI3 A. Divinité guerrière de face, casquée et cuirassée, tenant une épée de la main droite, et de la gauche une lance et un bouclier. À droite et ii gauche, dans le champ, un autel allumé en forme de colonnette.

d’aucune Rabbath de Moab ; mais, bien avant Eusèbe et saint Jérôme, on connaissait une ville dont les monnaies d’Antouin, de Septime-Sévère et de Caracalla nous ont conservé le nom de PAlîBAfc) MQBA (fig. 199) ; cf. de Saulcy, Numismatique de la Terre Sainte, p. 355-358. La Notitia dignilatum imperii, après avoir mentionné la cohors tertia Alpinorum auprès de l’Arnon, nous montre la ville d' Aréopolis occupée par les Equités Mauri Illijriciani. Cf. Reland, Palxslina, p. 579. Dire d’ailleurs que, Ar une fois détruite, Rabbath a hérité de son importance comme capitale avec un nom nouveau, est une assertion gratuite. L’opinion des contradicteurs de saint Jérôme est basée principalement sur cette croyance que « Ar était située sur les bords de l’Arnon ». Les preuves ne sont pas convaincantes. Un chant tiré « du livre des Guerres du Seigneur », Num.. xxr, 15, semble placer Ar « sur la frontière de Moab > ; mais, outre l’obscurité du texte, ne peut-on pas dire avec IL B. Tristram, The Land of Moab, Londres, 1874, p. 110, que, « comme il n’y a pas trace d’une cité importante entre Er-Rabbah et l’Ar non, il est aisé de comprendre pourquoi, dans ce passage, Arest regardée comme étant à la frontière septentrionale. » On l’assimile ensuite à « la ville qui est au milieu du ? torrent », c’est-à-dire de la vallée arrosée par le torrent d’Arnon, Jos., xiii, 9, 16 ; Deut., ii, 36 ; mais 1° toutes les versions ont ici rendu hâ'îr (avec l’article) par lele nom commun civitas, urbs, oppidum, « ville ; » 2° cette ville de la vallée, citée avec Aroer comme limite méridionale des possessions israélites au delà du Jourdain, semble avoir appartenu, aussi bien qu’Aroer (dont elle est distincte d’après le texte hébreu) aux enfants d’Israël, tandis que Dieu avait exclu Ar-Moab de leurs conquêtes. Quant à 'Ir Mô'âb, Num., xxit, 36, dans laquelle plusieurs auteurs reconnaissent la grande cité moabite, nous dirons également que toutes les versions ont traduit 'Ir par le nom commun et que l’absence de l’article en hébreu laisse au mot son sens indéfini.

D’un autre côté, Oumm er-Reças, où l’on voudrait voir l’emplacement d’Ar, se trouve, non pas au sud-est, mais bien au nord-est de l’Arnon, et est ainsi complètement à l’opposé de cette dernière". Aussi quelques-uns préfèrent Mouhâtet el-Hadj, un peu au-dessous de l’embouchure de VOuadi Enkeiléh dans VOuadi Modjib ; 'mais ces ruines paraissent peu importantes pour une ancienne capitale de Moab. Nous croyons donc devoir maintenir le site traditionnel d’Er-Rabbah.

III. Description. — Er-Rabbah est située â l’est de la mer Morte, en face de la presqu'île d’El-Liçân, sur la grande route qui conduit de Kérak vers Dhibân (Dibon) et Hesbdn (Hésébon) au nord. Plusieurs monticules, couverts d’herbe, semblent cacher les débris d’importantes constructions et payeraient sans doute amplement, par de curieuses découvertes, les recherches de l’explorateur (fig. 200). Parmi les ruines on remarque surtout une belle porte romaine qu’un tremblement de terre a disloquée. L’arcade principale s’est écroulée ; mais, à droite et à gauche, subsistent encore, parfaitement intactes, de petites arcatures latérales qui sont murées et n’ont du être que des fausses portes. Au-dessus de la petite porte de droite, les pierres de taille, secouées par le tremblement de terre, ont glissé les unes sur les autres, de sorte qu’elles ont l’air suspendues et prêtes à crouler au moindre choc. Cf. de Saulcy. Voyage autour de la merMorte, Paris, 1852, t. i, p. 347 ; atlas, planche xx. En deçà, quelques fûts de colonnes sont encore debout ; mais, hormis quelques tronçons et chapiteaux gisant épars sur le terrain, il semble que cet emplacement n’ait jamais été couvert de constructions, et qu’il devait être une sorte de place publique. De riches fragments analogues forment une véritable bordure à droite de la route qui conduit à ce point.

Un peu au sud de la porte romaine se trouvent deux citernes carrées : la première, à cinquante mètres du chemin, est de dimension ordinaire ; la seconde, plus loin et à cent mètres sur la droite, est trois fois plus grande. Les décombres qui les entourent au loin montrent que tout un quartier de la ville a du exister de ce côté.

A deux cents mètres à gauche est une enceinte carrée, dont les murs ont encore près de deux mètres de hauteur, et qui fut très probablement jadis le parvis d’un temple. Cette enceinte, ouverte au nord, est pavée de blocs équarris de lave noire. Dans les décombres se rencontrent fréquemment des blocs de lave travaillés, et qui appartiennent à une civilisation antérieure à la venue des Romains. L’un d’eux est un fragment de chambranle de porte ou de fenêtre, garni de moulures et d’un fleuron à l’angle. Cf. de Saulcy, Voyage autour de la mer Morte, p. 348, atlas, pi. l. Ce fleuron, dit M. Perrot, « rappelle celui d’où s'élance la plante sacrée dans les bas-reliefs assyriens ; il fait songer aussi à cette espèce de fleur qui surmonte parfois la tiare des génies, » Histoire de l’art dans l’antiquité, Paris, 1887, t. IV, p. 397, fig. 209. Le